La baisse de fréquentation de McDonald’s par les ménages pauvres aux États-Unis révèle un changement profond dans l’équilibre entre prix, menu et accessibilité, alors que la chaîne historiquement populaire voit son positionnement remis en question.
Aux USA, McDonald’s est devenu trop cher pour les pauvres

En novembre 2025, McDonald’s se retrouve face à une transformation inattendue : son public le plus fragile déserte progressivement ses restaurants à cause d’une hausse durable de ses prix et d’un contexte économique instable. L’enjeu est d’autant plus important que McDonald’s demeure un symbole culturel et social, longtemps associé à une nourriture bon marché et accessible à tous.
La défection des clients modestes : un signal d’alarme pour McDonald’s
Le constat dressé par McDonald’s est sans ambiguïté. Lors d’un échange avec les investisseurs, le groupe a expliqué que la fréquentation de ses restaurants par les consommateurs américains à faibles revenus avait chuté « de presque deux chiffres », selon les informations rapportées par le Los Angeles Times. Ce recul massif intervient malgré une présence dense de restaurants et un ancrage historique auprès des foyers aux budgets serrés. Cette évolution, très inhabituelle pour une enseigne structurée autour de la valeur perçue, traduit un malaise profond dans la relation entre prix pratiqués et pouvoir d’achat des consommateurs pauvres.
Dans le même temps, McDonald’s observe une dynamique inverse chez les ménages aisés. Les visites de cette catégorie ont augmenté de près de deux chiffres, toujours selon la même source. Ce décalage, rarement observé à cette échelle dans l’histoire de la marque, introduit un glissement sociologique dont les implications dépassent le simple suivi commercial. McDonald’s, autrefois considéré comme le restaurant familial abordable, attire désormais davantage les classes plus confortables, ce qui redéfinit la structure de sa clientèle mais montre potentiellement une dégradation du pouvoir d’achat généralisé.
Le renchérissement du menu a joué un rôle central. D’après les données publiées par le Los Angeles Times, le prix moyen d’un article proposé chez McDonald’s aux États-Unis a bondi de 40 % entre 2019 et 2024. Le prix du Big Mac est ainsi passé de 4,39 $ en 2019 (environ 4,05 €) à 5,29 $ en 2024 (environ 4,88 €), selon le journal The Independent. Le menu 10 McNuggets a connu une ascension similaire, montant de 7,19 $ (6,65 €) à 9,19 $ (8,47 €) sur la même période. L’analyste Adam Josephson souligne que « les menus enfants de McDonald’s sont devenus prohibitifs pour certaines personnes, parce que l’inflation a été trop forte ».
Ces augmentations reflètent des tensions structurelles qui touchent toute la restauration rapide. Les coûts salariaux ont grimpé de 40 %, tandis que les coûts alimentaires ont progressé de 35 % depuis 2019, selon les données fournies par The Independent. La chaîne explique qu’elle n’a eu d’autre choix que de répercuter ces surcoûts sur le prix du menu, ce qui pénalise mécaniquement les consommateurs les plus fragiles.
Christopher Kempczinski, directeur général de McDonald’s, résume l’impact de l’inflation sur les ménages modestes en expliquant que « l’inflation que subit le consommateur pauvre est très importante, et cela affecte son état d’esprit, sa confiance et ses comportements d’achat », relaye le Washington Post.
L’évolution des prix et des coûts bouleverse le modèle historique de la restauration rapide
Le modèle même de McDonald’s repose depuis des décennies sur un équilibre subtil : bas prix, volume élevé, standardisation et rapidité d’exécution. Cependant, la période récente soumet ces piliers à rude épreuve. Selon The Independent, l’ensemble du secteur des restaurants à service limité dont fait partie McDonald’s a vu ses prix grimper de 3,2 % sur un an, un rythme légèrement supérieur à l’inflation globale américaine du moment.
Au sein de cet environnement, McDonald’s doit arbitrer entre trois impératifs contradictoires : absorber des hausses de coûts sans compromettre la qualité, préserver des marges déjà fragilisées et maintenir une image d’enseigne accessible. Or, la tension inflationniste semble modifier durablement la carte de ce qui est considéré comme un repas « bon marché ».
Les ventes continuent pourtant d’augmenter. Le rapport du troisième trimestre 2025 fait état d’une hausse de 2,4 % des ventes comparables aux États-Unis et de 3,6 % à l’échelle mondiale, selon le Washington Post. Le chiffre d’affaires global a également progressé de 8 %, atteignant environ 36 milliards de dollars (près de 33 milliards d’euros). Néanmoins, ces performances masquent une fragilité sous-jacente : la catégorie de clientèle historiquement la plus fidèle est désormais celle qui s’érode le plus rapidement.
Un casse-tête stratégique pour l’avenir de la chaîne
Face à cette recomposition de sa clientèle, McDonald’s s’efforce de réagir sans renier son identité. L’entreprise a ainsi lancé ou renforcé plusieurs offres à bas prix, notamment des promotions ponctuelles et des « value meals », comme l’a rappelé l’agence Reuters.
Pour autant, la situation actuelle révèle un risque plus profond : celui d’une polarisation sociale du modèle McDonald’s. Si la marque attire davantage les ménages aisés, elle pourrait progressivement se détacher de son rôle social historique, celui d’un restaurant universel. Le danger est clair : un éloignement de la clientèle populaire réduirait le volume, diminuerait la rotation des produits et affaiblirait à long terme la logique même de la restauration rapide.
