Amazon s’apprête à franchir un cap décisif dans son histoire : robotiser massivement ses entrepôts pour réduire sa dépendance à la main-d’œuvre. D’après plusieurs documents internes révélés ces derniers jours, le géant du commerce en ligne prévoit d’automatiser près de 75 % de ses opérations d’ici 2033, un virage qui pourrait bouleverser l’équilibre entre emploi humain et robotique au sein du groupe.
Amazon : de créateur à destructeur d’emplois grâce aux robots ?

Le 22 octobre 2025, la presse américaine a révélé le plan d’automatisation à long terme d’Amazon, un projet d’une ampleur inédite. Selon des documents internes, la société envisagerait de remplacer jusqu’à 600 000 postes humains par des robots d’ici 2033. Cette stratégie, encore niée partiellement par l’entreprise, illustre la montée en puissance d’une technologie qui reconfigure en profondeur les métiers de la logistique.
Automatiser 75 % des opérations : l’ambition technologique d’Amazon
Amazon, déjà pionnier dans l’usage des robots en entrepôt, veut désormais passer à l’échelle supérieure. Les documents cités par The Verge évoquent l’objectif d’automatiser 75 % des opérations du groupe dans la décennie à venir. Cette transformation s’appuierait sur un réseau d’installations ultramodernes, dont celle de Shreveport (Louisiane), présentée comme un prototype d’« entrepôt du futur », selon Next INpact.
L’enjeu est clair : optimiser les flux logistiques et réduire la dépendance au travail humain dans un contexte de croissance continue. Computerworld rapporte qu’Amazon pourrait éviter de recruter environ 600 000 employés supplémentaires à mesure que les ventes mondiales doublent. Pour l’entreprise, il ne s’agit pas de licencier, mais de limiter les embauches futures. La direction présente cette stratégie comme « un moyen d’innover tout en faisant collaborer les robots avec les humains ».
Ces systèmes s’appuient sur une nouvelle génération de machines mobiles autonomes, de bras robotisés capables de saisir, trier et conditionner des produits, et d’outils d’intelligence artificielle capables de gérer les flux en temps réel. À en croire les documents révélés, l’entreprise aurait choisi d’employer dans sa communication interne des expressions comme « technologie avancée » ou « cobot » plutôt que « intelligence artificielle » ou « automatisation », pour réduire les inquiétudes internes.
Un gain économique colossal, mais des conséquences sociales redoutées
Les estimations financières associées à ce virage technologique donnent la mesure du projet. Selon The Verge, chaque article traité automatiquement générerait une économie moyenne de 0,30 dollar, soit près de 12,6 milliards de dollars entre 2025 et 2027. À plus court terme, environ 160 000 emplois pourraient être évités dès 2027 grâce à cette montée en puissance de la robotique.
Ces chiffres suscitent des inquiétudes dans le monde de l’emploi. Le professeur Daron Acemoglu, prix Nobel d’économie, a déclaré à The Verge : « Personne d’autre n’a la même incitation qu’Amazon à trouver le moyen d’automatiser… Si elle y parvient, l’un des plus grands employeurs des États-Unis deviendra un destructeur net d’emplois. » Cette perspective alimente le débat sur la responsabilité sociale d’un groupe qui emploie plus de 1,5 million de personnes dans le monde.
Les syndicats américains, pour leur part, redoutent une déstabilisation rapide des bassins d’emploi logistiques. Car si l’entreprise assure qu’elle n’envisage pas de licenciements massifs, la diminution des embauches pourrait toucher des zones déjà fragiles. De fait, les documents internes mentionnent des gains de productivité si importants qu’ils « permettraient de maintenir la croissance sans accroître les effectifs ». Une équation redoutable pour les salariés.
Amazon tente toutefois de rassurer. Dans un communiqué transmis à plusieurs médias, Kelly Nantel, porte-parole de l’entreprise, a précisé : « Les documents divulgués peignent souvent un tableau incomplet et trompeur de nos plans… Ces matériaux reflètent le point de vue d’une seule équipe et ne représentent pas notre stratégie globale d’embauche. » Le groupe insiste également sur la création de nouveaux postes techniques : selon une note interne de son équipe robotique, « nos entrepôts de nouvelle génération dotés de robotique avancée nécessiteront 30 % de personnel supplémentaire dans les métiers liés à la maintenance et à la sécurité », rapporte Next Inpact.
