Cancer du sein : ne négligeons pas les effets secondaires des traitements sur les pieds 

Intégrer davantage les professions paramédicales au parcours de soin contre le cancer, prévenir et sensibiliser les patients, les accompagner face aux effets secondaires des traitements, sont des actions essentielles. Une vraie synergie médicale permet d’améliorer le bien-être du patient dans cette période difficile. Car oui, la prise en charge des patients atteints d’un cancer du sein est un travail d’équipe à défendre et à renforcer !

Le pied : victime oubliée des traitements anticancéreux

Nausées, perte d’appétit, chute des cheveux, fatigue intense… la plupart des effets secondaires des traitements contre le cancer sont connus de tous. Mais les conséquences sur les pieds sont moins présentes dans l’esprit des patients. Allant de l’inflammation de la peau à des atteintes des ongles ou du pourtour unguéal, les syndromes podologiques liés aux traitements anticancéreux sont pourtant fréquents et peuvent avoir de lourdes conséquences. Syndromes main-pied, crevasses, ampoules, rougeurs et gonflements peuvent entraîner des douleurs intenses et dégrader la qualité de vie des patients dans les formes sévères. La marche devient parfois impossible, isolant davantage les patients dans leur lutte contre la maladie. Cela peut conduire l’oncologue à modifier le schéma thérapeutique du patient, en diminuant les doses prescrites ou en le suspendant de façon temporaire ou définitive.

Si le développement des traitements oraux permet aux patients de rester davantage chez eux, les évaluations cliniques à l’hôpital sont moins fréquentes, ce qui ne favorise pas le dépistage des effets secondaires podologiques. La prévention est indispensable, et l’évaluation régulière nécessaire, même avant l’apparition de douleurs. Dans les cas de maladies métastatiques, le traitement est administré aux patients tant qu’il est efficace contre le cancer. Certains peuvent ainsi le prendre pendant de longues périodes. Plus les doses administrées sont importantes et le traitement est long, plus les atteintes de la peau et/ou des phanères s’installent et nécessitent un temps de récupération important. Ne banalisons pas les effets secondaires sur les pieds. Il est temps de les anticiper en améliorant la prise en charge du pied pendant les traitements antitumoraux.

Une complémentarité de compétences au service du patient

Dans le parcours de soins du patient contre le cancer, le pédicure-podologue est un acteur important. La coopération entre les différentes expertises s’effectuant toujours au profit du patient, chacun joue un rôle avant, pendant et après le traitement. Qualité de vie, continuité du traitement, gain de chance : l’interdisciplinarité est le gage d’une bonne prise en charge globale du patient. Dès le dépistage d’un cancer, le rôle de prévention et de soin des professions paramédicales doit être renforcé, y compris en ville pour accompagner le maintien à domicile.

Dans cette équation, la force du pédicure-podologue repose sur son expertise : la consultation se concentre sur le diagnostic, le dépistage et le soin. Non seulement le praticien va pouvoir anticiper et soigner les maux (notamment grâce à divers appareillages comme des orthèses plantaires par exemple), mais il participe également à l’éducation thérapeutique globale du patient, ce qui lui permet de gérer au mieux sa vie avec les effets secondaires de son traitement.

En diabétologie, le pédicure-podologue intervient régulièrement pour soigner les complications fréquentes de la maladie sur les pieds. Dans la prise en charge des patients atteints du cancer aussi, le spécialiste du pied doit être intégré de façon plus systématique.

La pédicurie-podologie : un enjeu de santé publique

Au cours du 1^er trimestre 2024, les patients atteints de cancer pourront bénéficier de l’intervention - prise en charge par l’assurance maladie - des pédicures-podologues en amont et pendant les traitements anticancéreux. Cet avenant à la Convention nationale est une première étape cruciale dans la reconnaissance de l’importance du rôle de la profession dans la prévention et le suivi notamment du syndrome main-pied.

Ce premier acte fort ne doit pas rester isolé. C’est par l’universitarisation organique de la formation des professions paramédicales que la coopération entre les différents professionnels de santé pourra se renforcer. Il est temps d’encourager les enseignements pluridisciplinaires et de mettre en place, à l’université, des unités d’enseignement spécifiques pour répondre à des besoins médicaux particuliers (comme les différents effets secondaires podologiques chez les patients atteints de cancer).

Les avancées récentes en matière de prévention et de suivi, ainsi que les perspectives d’universitarisation des professions paramédicales n’ont qu’un seul objectif commun : optimiser la prise en charge des patients. Dans les cas de cancer du sein, des effets secondaires non traités ou traités trop tard sont une double peine pour un patient déjà affaibli. Ne nous concentrons pas uniquement sur la maladie. Intégrer des expertises podologiques renforce les chances de guérison et permet en outre d’améliorer le parcours de soin des patients.