Le dernier rapport GEO-7 de l’ONU dresse une évaluation glaçante du climat mondial et révèle, chiffres inédits à l’appui, l’ampleur des dommages environnementaux causés par nos modes de production.
Climat : la planète se dirige vers une crise sans précédent, alerte l’ONU

Publié le 9 décembre 2025, le rapport GEO-7, présenté par l’ONU, établit un diagnostic sans équivoque : la planète s’approche d’un basculement climatique majeur. Ce document massif, présenté comme l’analyse scientifique la plus complète jamais réalisée sur l’environnement, synthétise des décennies de données et montre comment le climat bascule vers une instabilité durable.
Une alerte globale : la trajectoire climatique mondiale se dégrade
Le statu quo climatique entraîne des dommages sans précédent
Dès les premières pages, le rapport de l’ONU rappelle que les émissions de gaz à effet de serre ont progressé d’environ 1,5 % par an depuis 1990 et ont atteint un niveau record en 2024, ce qui aggrave fortement les pressions sur le climat. Cette évolution, déjà observée dans les séries scientifiques, explique pourquoi le seuil de 1,5 °C de réchauffement devrait être franchi dès le début des années 2030. Le document indique ainsi que la température mondiale dépasserait 2 °C au cours des années 2040 si aucune inflexion majeure n’intervient. Cette accélération place les sociétés face à une crise climatique qui n’est plus théorique, d’autant que les phénomènes extrêmes coûtent déjà environ 143 milliards de dollars par an, soit près de 132 milliards d’euros, selon le rapport GEO-7.
Pour souligner l’urgence, Robert Watson, coprésident de l’évaluation, avertit que « nous devons transformer nos systèmes humains immédiatement, avant que l’effondrement ne devienne inévitable », a-t-il déclaré selon le rapport GEO-7. Ce message traduit l’inquiétude d’une communauté scientifique qui voit les impacts du climat rattraper les projections les plus pessimistes. De plus, l’ONU estime que le statu quo pourrait amputer le PIB mondial de 4 % d’ici 2050 et de 20 % d’ici la fin du siècle, un signal fort pour l’économie mondiale.
Des crises interconnectées fragilisent la planète entière
Le rapport précise que 20 % à 40 % des terres émergées sont déjà dégradées et que cette tendance affecte plus de trois milliards de personnes. Chaque année, environ 24 milliards de tonnes de sols fertiles disparaissent, ce qui pèse sur les rendements agricoles et accentue les tensions sur l’alimentation mondiale. Dans le même temps, environ un million d’espèces sont menacées d’extinction, confirmant que la détérioration de la biodiversité aggrave la vulnérabilité du climat. Cette dynamique est décrite comme une crise écologique liée à l’activité humaine, qui accroît les risques de pénuries et de migrations forcées.
Dans sa synthèse, l’ONU estime que la pollution, aujourd’hui responsable de neuf millions de décès prématurés par an, constitue le premier facteur de risque environnemental pour la santé humaine. Les dommages sanitaires provoqués par la pollution de l’air représentaient, en 2019, près de 8,1 billions de dollars, soit plus de 7 400 milliards d’euros. À ces impacts s’ajoute la croissance de la production de déchets solides, susceptible de presque doubler d’ici 2050, alors que plus de 8 milliards de tonnes de plastiques se sont déjà accumulées dans l’environnement.
Un coût économique gigantesque qui redessine les priorités politiques
Une économie mondialisée face à l’addition du dérèglement climatique
L’analyse du GEO-7 révèle que les activités productives représentent un poids financier colossal pour l’économie, notamment à travers les dommages environnementaux. Le rapport estime que la production alimentaire et la production d’énergies fossiles entraînent ensemble environ cinq milliards de dollars de dégâts par heure, soit près de 4,6 milliards d’euros. Sur une année, cette facture s’élève à environ 45 000 milliards de dollars, soit 41 400 milliards d’euros, un montant totalement inédit dans l’histoire de l’analyse environnementale. L’ONU attribue environ 18 400 milliards d’euros au système alimentaire, 12 000 milliards d’euros au transport et près de 11 000 milliards d’euros à l’électricité issue des combustibles fossiles.
Cette situation reflète une distorsion structurelle : les systèmes actuels reposent sur des subventions considérées comme dommageables pour la nature, estimées à 1 500 milliards de dollars par an, soit 1 380 milliards d’euros. L’ONU souligne qu’il s’agit là d’un levier central, car ces soutiens massifs entretiennent une économie carbonée, éloignée des trajectoires compatibles avec un climat stable. Dans une déclaration publiée avec le rapport, Edgar Gutiérrez-Espeleta rappelle que « la science est solide et les solutions sont connues ; ce qu’il faut désormais, c’est le courage d’agir à l’échelle et à la vitesse que l’histoire exige ».
La montée des risques économiques sous l’effet du changement climatique
Le GEO-7 note que la dégradation des terres entraîne des pertes économiques importantes, notamment en raison de la baisse de productivité agricole. La raréfaction des sols fertiles, combinée aux effets des températures extrêmes, pourrait réduire la disponibilité alimentaire de 3,4 % par personne d’ici 2050. Cette projection place l’agriculture au cœur de la crise, car elle subit un double choc : celui du climat et celui de l’érosion des écosystèmes. En outre, les phénomènes climatiques extrêmes amplifient le risque d’interruptions économiques majeures, qu’il s’agisse d’inondations, de vagues de chaleur ou de sécheresses prolongées.
Selon l’ONU, la poursuite d’un modèle de développement fondé sur l’extraction de ressources, qui pourrait croître de 70 % entre 2020 et 2050, conduirait à un épuisement des stocks naturels et ferait basculer la crise environnementale dans une situation de rupture. L’organisation signale aussi qu’un réchauffement de 2 °C provoquerait une quasi-disparition des récifs coralliens d’eaux chaudes, ce qui aurait un impact sévère sur les pêcheries, donc sur l’économie maritime.
Quels scénarios pour éviter la déstabilisation irréversible du climat ?
Les trajectoires proposées par l’ONU exigent une transformation radicale
Pour inverser la tendance actuelle, le GEO-7 présente deux scénarios de transformation : l’un fondé sur une évolution des comportements et une moindre dépendance à la consommation matérielle, l’autre davantage centré sur des gains d’efficacité technologique. L’objectif est clair : stabiliser le climat tout en améliorant la résilience des sociétés. Selon le rapport, l’investissement nécessaire pour atteindre la neutralité carbone et financer la restauration de la biodiversité s’élève à environ 8 000 milliards de dollars par an, soit plus de 7 300 milliards d’euros jusqu’en 2050.
Ces investissements colossaux seraient cependant compensés, selon l’ONU, par des bénéfices économiques considérables. Les projections indiquent que les avantages macroéconomiques commenceraient à apparaître vers 2050, atteindraient environ 20 000 milliards de dollars par an en 2070 — soit 18 400 milliards d’euros — et pourraient dépasser 92 000 milliards d’euros au-delà de cette échéance. Dans un message d’introduction, Inger Andersen souligne que le GEO-7 « offre à l’humanité un choix clair : continuer vers un avenir dévasté par le dérèglement ou changer de direction pour garantir une planète viable ».
Repenser les systèmes économiques pour sortir de la crise climatique
Le rapport insiste sur l’idée que la sortie de la crise climatique ne peut se faire qu’en réformant cinq grands systèmes : l’économie et la finance, les matériaux et déchets, l’énergie, l’alimentation et l’environnement. Parmi les pistes proposées, la plus structurante concerne l’abandon du PIB comme principal indicateur de performance économique. L’ONU propose de le remplacer par un indicateur de richesse inclusive intégrant le capital naturel, indispensable pour prendre en compte la valeur réelle d’un climat stable et d’écosystèmes fonctionnels.
Le rapport appelle également à accélérer la restauration des écosystèmes, à renforcer la gestion des ressources critiques et à garantir l’accès à une énergie propre pour les populations vulnérables. Enfin, les auteurs rappellent que ces transformations pourraient permettre d’éviter neuf millions de décès prématurés par an d’ici 2050, d’extraire 200 millions de personnes de la sous-alimentation et d’offrir à 300 millions d’individus un accès sécurisé à l’eau potable.
