Corse : 250 000 billets d’avion achetés pour relancer le tourisme hivernal

Une stratégie économique calibrée pour la basse saison

Depuis le 16 octobre 2025, la Collectivité de Corse a officiellement confirmé un investissement public d’environ 2,5 millions d’euros par an afin de subventionner 250 000 billets d’avion destinés aux touristes voyageant hors saison. Cette opération s’étalera sur quatre années, selon les détails présentés par les autorités insulaires.

La mesure repose sur un principe inédit en Europe : au lieu de verser une aide directe à une compagnie aérienne, la collectivité achète elle-même les sièges, qu’elle confie ensuite aux transporteurs sélectionnés à l’issue d’un appel d’offres. « D'habitude, on est dans une logique où on subventionne une compagnie aérienne et des sièges. Mais nous, nous sommes dans une logique de mise en concurrence des compagnies aériennes », a expliqué Gilles Simeoni, président de la Collectivité de Corse, dans un reportage de TF1.

Cette orientation marque un tournant pour la Corse, où 80 % des flux touristiques sont concentrés entre juin et septembre, engendrant congestion, hausse des prix et nuisances multiples. À l’inverse, l’hiver reste une période désertée, malgré des infrastructures prêtes à accueillir davantage de visiteurs. Selon Vanina Piazza d’Olmo, hôtelière à Ajaccio : « Les mois d'hiver sont plus difficiles à remplir. En général, à partir de mi-octobre, le flux de touristes commence à baisser », propos recueillis par TF1.

Douze lignes ciblées, une logique de flux et de rendement

Le dispositif concerne 12 lignes aériennes desservant l’île entre octobre et avril. Parmi elles, neuf sont domestiques (notamment au départ de Bordeaux, Nantes ou Strasbourg), et trois sont internationales, depuis Rome, Bruxelles et Charleroi. Ces liaisons ont été réparties entre les compagnies Volotea et Air Corsica, dans le cadre de contrats de concession validés par l’Assemblée de Corse début octobre.

L’objectif est de répartir les flux touristiques sur l’année pour stabiliser l’activité des hôteliers, restaurateurs, guides ou loueurs de véhicules. Le président Simeoni a résumé l’ambition de la région devant l'Assemblée de Corse : « L’idée, c’est d’éviter le surtourisme en été avec la cohorte de nuisances qu’il génère et créer un tourisme en dehors de la saison estivale pour avoir une activité économique toute l’année avec des retombées directes et indirectes considérables ».

Les compagnies retenues devront impérativement atteindre les objectifs de fréquentation fixés. Dans le cas contraire, des pénalités financières sont prévues. Ce levier incite les transporteurs à proposer des prix attractifs, notamment à travers des promotions ciblées. Le prix de revente des billets aux voyageurs dépendra donc de la saison, du taux de remplissage et du marché. Une flexibilité que la CDC juge indispensable pour garantir le succès du projet.

Un pari économique de grande ampleur

À long terme, les autorités espèrent générer 100 millions d’euros de retombées annuelles grâce à ce plan, selon les prévisions relayées par TF1 Info. Ce montant englobe les dépenses directes des touristes mais aussi les effets induits sur les chaînes d’approvisionnement locales. À titre comparatif, le coût total du dispositif sur quatre ans serait de 10 millions d’euros, soit un ratio jugé très favorable par ses promoteurs.

Selon les derniers chiffres de la chambre de commerce, 7,25 millions de passagers ont transité par les ports et aéroports corses au cours des neuf premiers mois de 2025, soit une hausse de 7 % au premier trimestre et de 3 % au second par rapport à 2019. Une dynamique encourageante, que les élus veulent prolonger au-delà de la haute saison.

Sur le plan budgétaire, la mise en œuvre démarre avec une enveloppe de 500 000 euros pour l’année 2025, avant de passer à 2,5 millions par an en régime plein dès janvier 2026. L’investissement global pourrait donc avoisiner 3 millions d’euros sur quatre ans, selon une estimation alternative fournie par RMC.

Enfin, l’impact social n’est pas négligeable. Selon CorseNetInfos, 35 000 emplois seraient aujourd’hui directement ou indirectement liés au tourisme sur l’île. Répartir l’afflux des visiteurs permettrait de consolider ces postes en période creuse, réduisant la dépendance aux seuls mois estivaux.