Dépression sévère : les ultrasons montrent des résultats prometteurs

Le journal scientifique Brain Stimulation publiait, le 29 avril dernier, une étude qui pourrait bouleverser les paradigmes du soin en santé mentale. Cette publication signée par une équipe interdisciplinaire, GHU Paris, Inserm, CNRS, Université Paris Cité et ESPCI Paris-PSL, révèle que des ultrasons focalisés de faible intensité seraient capables de soulager des formes sévères de dépression résistante aux traitements traditionnels.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 6 mai 2025 19h00
Dépression sévère : les ultrasons montrent des résultats prometteurs
Dépression sévère : les ultrasons montrent des résultats prometteurs - © Economie Matin

Une perspective médicale pour traiter la dépression d'autant plus cruciale que, selon Santé publique France, « 12,5 % des personnes de 18 à 85 ans ont connu un épisode dépressif caractérisé au cours de l’année 2021 », et qu’un patient sur trois ne répond toujours pas aux traitements pharmacologiques. Les chercheurs posent ainsi une question décisive : peut-on moduler les zones profondes du cerveau sans neurochirurgie ni sédation chimique ? La réponse pourrait désormais se mesurer en ondes acoustiques.

Une méthode sans scalpel, sans douleur, et avec 60 % de succès sur les dépressions

Les auteurs de l’étude ont conçu un dispositif portable innovant basé sur des lentilles acoustiques capables de focaliser des ultrasons de faible intensité sur une zone précise du cerveau : la région cingulaire subcalleuse, impliquée dans les mécanismes de la dépression. Contrairement aux méthodes actuelles nécessitant l’implantation d’électrodes, ce dispositif contourne les risques de la neurochirurgie. Durant cinq jours, cinq participants souffrant de dépression résistante ont suivi 25 sessions de cinq minutes. Le constat est sans appel : « Au cinquième jour de traitement, la gravité de la dépression avait été réduite en moyenne de 60,9 % », écrivent les chercheurs dans l’étude.

Quatre patients sur cinq ont vu leurs symptômes diminuer de façon significative, deux d’entre eux étant même entrés en rémission complète. Ces résultats ne se sont pas accompagnés de souffrance physique, ni de gêne sensorielle. « Aucun événement indésirable grave n’est survenu au cours de cette étude et les examens IRM effectués après le traitement n’ont révélé aucune modification du signal dans le cerveau. Aucun des patients n’a signalé de sensation ou de douleur sur le cuir chevelu pendant ou après les séances », indique la publication. Les patients n’ont perçu aucun son et n’étaient donc pas capables de savoir si les ultrasons étaient émis ou non pendant le protocole, éliminant ainsi un éventuel effet placebo lié à la perception.

Quand les ultrasons entrent dans l’arsenal psychiatrique contre les dépressions

Le recours aux ultrasons dans les pathologies neurologiques n’est pas une nouveauté. Déjà testés avec succès dans la maladie de Parkinson ou le traitement du tremblement essentiel, ils démontrent ici un potentiel thérapeutique dans un domaine que beaucoup estimaient à l’arrêt : la dépression sévère. Ces travaux s’inscrivent dans une vague internationale de recherches sur les stimulations transcrâniennes non invasives, connues sous le nom de LIFUS (Low-Intensity Focused Ultrasound Stimulation).

L'originalité du protocole testé en France repose aussi sur la personnalisation des lentilles acoustiques en fonction de l’anatomie crânienne du patient, permettant une focalisation plus précise des ondes et donc une meilleure efficacité clinique. Le CNRS comme l’Inserm insistent sur la nouveauté de cette approche, encore jamais mise en œuvre dans un protocole aussi rigoureux. Mais les chercheurs restent prudents. « Bien que les résultats soient encourageants, il faut les interpréter avec prudence, car il s’agit d’une première étude de sécurité sur un nombre limité de patients et sans groupe placebo », avertissent-ils dans des propos partagés par l'Inserm. Des études cliniques de plus grande envergure, contrôlées en double aveugle, sont d’ores et déjà planifiées pour confirmer ces données.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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