Inflation, livret A, dette publique ou fiscalité : l’économie s’impose dans le débat public. Les Français disent s’y intéresser davantage, portés par la hausse des prix et les arbitrages budgétaires du quotidien. Pourtant, derrière cet intérêt affirmé, les lacunes demeurent profondes, comme le montre une récente étude Ipsos BVA.
Les Français s’intéressent à l’économie, mais restent largement démunis face aux chiffres

Décembre 2025. À l’occasion de la 27e Journée du Livre d’Économie organisée à Paris, un sondage Ipsos BVA dresse un constat nuancé sur le rapport des Français à l’économie. La compréhension des mécanismes économiques reste fragile et très inégalement répartie selon les profils sociaux.
Un intérêt pour l'économie réel mais encore superficiel
L’économie attire aujourd’hui une majorité de Français. Selon le sondage Ipsos BVA réalisé pour l’association Lire la Société, 60 % des personnes interrogées déclarent s’y intéresser “un peu” ou “beaucoup”, selon l’enquête menée début décembre 2025 et révélée par Ouest-France. Cet intérêt pour l’économie progresse dans le temps, porté par l’inflation, la question du pouvoir d’achat et les débats récurrents sur les finances publiques.
Cependant, cet attrait reste souvent déclaratif. Dans les faits, seulement 54 % des Français se disent “très” ou “assez” à l’aise avec les sujets économiques, comme le PIB, la dette, le Smic ou le chômage, selon la même source. Ce chiffre marque certes une amélioration par rapport à 2017, où ils n’étaient que 46 %, mais il souligne aussi qu’une large partie de la population reste en difficulté face à l’économie.
Les écarts sont marqués selon les catégories sociales. Les seniors et les cadres supérieurs affichent un niveau de confort nettement plus élevé avec l’économie, tandis que les jeunes, les ouvriers et les employés se déclarent plus fréquemment perdus. Autrement dit, l’économie intéresse, mais elle ne se maîtrise pas de façon homogène.
Inflation, livret A, salaires : des repères économiques flous
Lorsque l’on entre dans le détail, les lacunes apparaissent plus nettement. Sur des indicateurs pourtant omniprésents dans l’actualité économique, les repères manquent. Moins d’un quart des Français savent situer correctement le taux d’inflation, estimé autour de 1 % au moment de l’enquête, selon Ipsos BVA . De même, une minorité seulement est capable d’évaluer correctement le salaire médian net dans le secteur privé, donné comme étant d’environ 2 200 euros.
Le livret A, produit d’épargne pourtant détenu par une majorité de ménages, illustre également ce décalage. Son taux est fixé à 1,7 % depuis le 1er août 2025, selon les données officielles de Service-Public.fr et du ministère de l’Économie. Pourtant, le sondage montre qu’une large partie des Français ignore ce niveau ou en a une estimation erronée, révélant une compréhension limitée des mécanismes d’épargne et de rendement réel face à l’inflation.
Finances publiques : intérêt marqué, compréhension partielle
Les finances publiques figurent parmi les sujets qui intriguent le plus, mais aussi parmi ceux qui sont le moins bien compris. Selon l’étude Ipsos BVA, seuls 28 % des Français connaissent vraiment la part des dépenses de protection sociale rapportée au PIB, donnée estimée à environ 30 %. Ce chiffre illustre un grave déficit de compréhension sur des mécanismes pourtant structurants du modèle social français. Dans le même temps, seuls 54 % des répondants estiment que les données économiques publiées par les institutions publiques reflètent bien la réalité, ce qui montre une confiance toute relative dans la parole institutionnelle. Autrement dit, certains Français soupçonnent les institutions de délivrer des chiffres partiaux, soit par manque de moyens ou de compétences, soit par désir de travestir, même légèrement, la réalité.
Face à ces lacunes, les attentes sont claires. L’étude Ipsos BVA indique que 41 % des Français jugent prioritaire de renforcer l’enseignement des enjeux économiques dans les parcours scolaires, et 53 % estiment cette évolution importante. Les priorités exprimées concernent avant tout la compréhension des concepts économiques de base, citée par 55 % des répondants, ainsi que le fonctionnement du budget de l’État, des impôts et de la protection sociale, mentionné par 49 %. Ces chiffres traduisent une demande forte de pédagogie économique, afin de réduire l’écart entre l’intérêt croissant pour l’économie et la capacité réelle à en comprendre les mécanismes.
