Acheter un logement relève désormais de l’exploit financier. Derrière les chiffres froids d’une étude récente, l’immobilier français révèle une mécanique grippée, anxiogène, où les acheteurs sont sommés de gagner toujours plus pour accéder à toujours moins, pendant que le marché continue de s’éloigner de la réalité des salaires.
Immobilier : acheter en ville est devenu quasiment impossible

Le 16 décembre 2025, une étude publiée par la plateforme Bien’ici a jeté une lumière crue sur l’immobilier en France. En détaillant les revenus nécessaires pour acheter ou louer un logement dans les grandes villes, elle met surtout en évidence une dérive inquiétante : l’immobilier exige désormais des salaires que la majorité des ménages n’atteindra jamais, notamment à Paris.
Immobilier à Paris : des salaires absurdes nécessaires pour acheter ?
À Paris, l’immobilier ne se contente plus d’être cher, il devient irréaliste. Selon l’étude Bien’ici publiée le 16 décembre 2025, un ménage doit percevoir environ 9 670 euros nets par mois pour acheter un trois-pièces ancien dans la capitale. Cette donnée repose sur une hypothèse pourtant prudente : consacrer un tiers de ses revenus au logement. Or, même ce standard bancaire historique semble aujourd’hui hors de portée pour la plupart des acheteurs potentiels.
Le constat est encore plus brutal dans le neuf. L’immobilier parisien exige plus de 13 000 euros de revenus mensuels pour accéder à un T3 neuf, selon Bien’ici. Autrement dit, seuls les foyers appartenant à une élite salariale peuvent encore envisager l’achat sans apport exceptionnel ou héritage. Cette situation n’est plus marginale, elle devient structurelle. Comme l’a résumé Bien’ici, « les écarts de pouvoir immobilier peuvent aller du simple au triple selon la ville et le type de logement ».
Des acheteurs immobiliers étranglés, même hors de Paris
Quitter Paris ne suffit plus à échapper à la pression de l’immobilier. Certes, les niveaux de salaires requis sont inférieurs en région, mais la tendance reste la même : les revenus nécessaires augmentent plus vite que les salaires réels. À Nice, par exemple, l’achat d’un trois-pièces ancien nécessite désormais plus de 5 500 euros mensuels, selon l’étude Bien’ici. La ville affiche même un record national, avec une hausse de 37 % des revenus nécessaires depuis 2020.
Dans d’autres grandes villes comme Toulouse, Nantes, Rennes ou Marseille, l’immobilier apparaît plus accessible sur le papier. Les revenus requis pour acheter un T3 ancien y oscillent entre 3 400 et 3 700 euros mensuels, selon Bien’ici. Mais ce chiffre cache une réalité plus sombre : il s’agit déjà de niveaux de salaire supérieurs aux revenus médians locaux. Pour de nombreux acheteurs, l’accès à la propriété reste donc conditionné à une double source de revenus stables, sans accident de parcours, dans un contexte économique pourtant incertain.
Hausse des prix, crédit cher et pouvoir d’achat en chute libre : la crise de l’immobilier est toujours là
Ce qui ne va pas dans l’immobilier français, ce n’est pas seulement le niveau des prix, mais leur dynamique. L’étude Bien’ici montre que, entre décembre 2020 et décembre 2025, les revenus nécessaires pour se loger ont bondi dans toutes les grandes villes. Et ça ne concerne pas que l’achat. Pour la location d’un trois-pièces, la hausse varie entre 17 % et 26 % selon les territoires. À Paris, elle atteint 21 %, soit 1 248 euros de revenus mensuels supplémentaires pour louer le même logement, selon les chiffres publiés par Bien’ici.
Côté achat, la situation est tout aussi préoccupante. Les revenus nécessaires pour acquérir un T3 ancien ont augmenté de 8 % à 30 % selon les villes. Cette envolée s’explique par un cocktail bien connu des acheteurs : prix élevés, raréfaction de l’offre, et surtout renchérissement du crédit. L’étude se base sur un taux d’intérêt de 3,2 % sur 25 ans, avec un ménage type gagnant 4 500 euros par mois et disposant d’un budget logement plafonné à 1 500 euros. Même dans ce scénario théorique, la capacité d’achat plafonne à 309 483 euros, un montant insuffisant dans de nombreuses grandes villes pour obtenir un T3, et évidemment impossible à Paris où les prix dépassent très facilement les 500.000 euros.
David Benbassat, président de Bien’ici, l’a reconnu sans détour en expliquant que « le revenu nécessaire pour trouver un lieu de vie a fortement progressé que ce soit pour la location ou l’acquisition ». Pour les acheteurs, le message est clair et inquiétant : l’immobilier ne se contente plus d’exiger des efforts, il impose un déclassement. Sans apport conséquent, sans progression salariale rapide ou sans aide familiale, l’accès à la propriété devient un horizon qui recule d’année en année.
