Un implant sous la rétine, développé en France, redonne une vision centrale fonctionnelle à des patients atteints de la forme sèche de la DMLA. Ce dispositif, combiné à des lunettes de réalité augmentée, ouvre une voie thérapeutique inédite pour une maladie jusqu’ici incurable.
Un implant sous la rétine redonne l’espoir aux patients atteints de DMLA

Un consortium de chercheurs français et européens a dévoilé, le 20 octobre, les résultats prometteurs d’un implant sous-rétinien innovant. Installé directement sous la rétine, cet implant pourrait transformer la vie de milliers de patients atteints de DMLA, une affection qui détruit progressivement la macula et prive de la vision centrale. Selon les données publiées par l’Inserm, le dispositif offre des résultats jamais observés jusqu’à présent dans la forme dite « sèche » de la maladie.
Un implant qui redonne une vision centrale fonctionnelle
L’étude multicentrique coordonnée par l’Inserm a inclus 38 patients souffrant de DMLA atrophique, répartis dans 17 centres de cinq pays européens, dont plusieurs établissements français. L’objectif est d'évaluer la sécurité et l’efficacité d’un implant sous-rétinien combiné à un système de lunettes à réalité augmentée. Les participants, âgés en moyenne de 78,9 ans, avaient perdu presque toute leur vision centrale. Après un an, les résultats ont dépassé les attentes. 81 % des patients ont retrouvé une amélioration d’au moins 0,2 logMAR, soit la capacité de lire dix lettres de plus qu’avant l’intervention. Pour 78 % d’entre eux, le gain a atteint 0,3 logMAR, correspondant à une quinzaine de lettres supplémentaires.
Dans un cas exceptionnel, le gain maximal observé a dépassé 1,18 logMAR, permettant à un patient de lire 59 lettres de plus qu’au départ. Ces progrès s’accompagnent d’une tolérance jugée satisfaisante : 26 événements graves ont été recensés, principalement des hypertensions oculaires ou de petits décollements de la rétine, dont 95 % ont été résolus rapidement. Le professeur José-Alain Sahel, ophtalmologiste et coordinateur de l’étude, souligne, dans le communiqué de presse de l’Inserm : « Le bénéfice s’est révélé bien supérieur aux effets indésirables ».
Un bijou technologique né de la recherche française
Le dispositif, baptisé PRIMA, repose sur une micro-puce photovoltaïque de 2 mm sur 2 mm et de 30 micromètres d’épaisseur, comportant 378 électrodes. Implantée sous la rétine, elle agit comme un relais lumineux. Les lunettes externes captent l’image, la traitent grâce à un algorithme capable d’augmenter contraste et luminosité jusqu’à 12 fois, puis la retransmettent via des faisceaux infrarouges à la puce. L’implant convertit ces signaux en impulsions électriques, stimulant directement les cellules visuelles résiduelles.
Présenté comme la première technologie sous-rétinienne permettant de lire des mots et des phrases tout en conservant la vision périphérique, l’implant PRIMA marque une rupture dans la stratégie thérapeutique de la DMLA. « Jusqu’à présent, d’autres types d’implants sous-rétiniens avaient été développés, avec des bénéfices bien moindres. C’est la première fois qu’un système permet à des patients ayant perdu leur vision centrale de lire à nouveau des mots, voire des phrases, tout en conservant leur vision périphérique. », a déclaré José-Alain Sahel à l’agence EurekAlert!. Les médias internationaux tels que Scientific American ont également relayé ces résultats, précisant que 84,4 % des participants pouvaient désormais lire chez eux lettres, chiffres et mots après un an d’utilisation. « C’est la première fois qu’un implant permet à des patients aveugles centraux de lire à nouveau », peut-on lire sur le site EurekAlert.
Une avancée scientifique et économique stratégique
Au-delà de la prouesse médicale, ce projet illustre la vitalité de la filière française de la vision. Développé par la start-up Pixium Vision, issue des travaux de l’Institut de la Vision et de l’AP-HP, le dispositif mobilise des compétences issues de la recherche publique et du secteur industriel. L’implant, encore expérimental, pourrait à terme réduire le coût socio-économique colossal de la DMLA, qui touche près d’un million de personnes en France selon les estimations de Santé publique France. Cette innovation ouvre la perspective d’un traitement fonctionnel pour la forme sèche de la maladie, longtemps considérée comme irréversible.
Si une homologation européenne est envisagée, une phase de déploiement clinique plus large sera nécessaire avant une mise sur le marché. D’après les chercheurs, la miniaturisation et la fiabilité du système permettront de limiter les coûts et d’envisager une diffusion à grande échelle. Les patients, souvent exclus des approches thérapeutiques actuelles, pourraient ainsi retrouver une autonomie visuelle partielle, lire, reconnaître des visages, se déplacer plus facilement. Pour le Pr Sahel, cette avancée « symbolise le croisement entre l’ingénierie photonique, la neuro-stimulation et la rééducation sensorielle », un axe majeur de la médecine de demain.
