Inflation américaine : pourquoi les ménages restent inquiets malgré des chiffres « sages »

Alors que l’inflation officielle reflue aux États-Unis, avec un core CPI et un core PCE désormais proches de 3 %, les ménages continuent d’exprimer un profond malaise face à la hausse des prix. Les enquêtes montrent qu’ils anticipent encore une inflation supérieure à 5 % sur un an, un niveau bien au-dessus des chiffres publiés.

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By Etienne Gorgeon Published on 22 décembre 2025 5h30
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Inflation américaine : pourquoi les ménages restent inquiets malgré des chiffres « sages » - © Economie Matin
3%L'inflation aux USA pourrait dépasser les 3% sur un an en 2025.
Autrement dit : le recul statistique de l’inflation ne se traduit pas par un apaisement du ressenti.
Ce décalage, devenu structurel, tient autant aux mécanismes statistiques qu’à la réalité quotidienne des dépenses.
D’un côté, les indices officiels sont construits de manière à lisser les variations volatiles : le CPI repose sur un panier fixe qui pèse fortement l’immobilier, tandis que le PCE, utilisé par la Fed, réduit ce poids de moitié et suit davantage le comportement réel des consommateurs via une méthode dite « chaîne-type ». Cette approche capte mieux les substitutions entre produits mais tend à aplanir les hausses les plus abruptes. Par ailleurs, le PCE couvre un périmètre plus large, notamment les dépenses de santé financées par des tiers, ce qui modère encore l’indice.
De l’autre côté, la perception des ménages est façonnée par les achats récurrents et visibles, alimentation, carburant, loyers, frais médicaux, dont les hausses sont directement ressenties, parfois plusieurs fois par semaine. Ces postes pèsent moins dans les calculs officiels, mais beaucoup plus lourd dans les budgets familiaux. Le passage en caisse, qu’il s’agisse de faire le plein ou de faire les courses, crée un ancrage psychologique fort : l’inflation « vécue » semble supérieure à l’inflation « mesurée ». Lorsque les salaires réels progressent moins vite, la perte de pouvoir d’achat paraît d’autant plus tangible.
Le climat politique contribue aussi à la déconnexion. Dans un contexte de polarisation, une partie de l’opinion doute des statistiques fédérales, tandis que l’environnement médiatique et les tensions commerciales mettent l’accent sur des postes où les hausses sont les plus visibles, renforçant le sentiment d’un problème inflationniste persistant. Les droits de douane, par exemple, alimentent l’idée d’une pression continue sur les prix, même lorsque l’impact macro apparaît limité.
En définitive, les indices CPI et PCE remplissent leur fonction : mesurer l’inflation moyenne de l’économie. Mais ils ne reflètent pas fidèlement la réalité vécue par les ménages, particulièrement lorsque les hausses les plus marquantes concernent les biens essentiels. Le malaise des consommateurs, nourri par leur budget quotidien plus que par les courbes macroéconomiques, explique pourquoi l’opinion reste négative alors que l’inflation officielle se rapproche de l’objectif de la Fed.
Etienne Gorgeon 1

Responsable Gestion Obligataire chez Sanso Longchamp AM

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