La baguette à 29 centimes chez Lidl, l’affaire du siècle ?

À fin août 2025, la baguette classique—le produit d’appel par excellence—revient au menu promotionnel des grandes enseignes. Lidl et Aldi affichent un tarif record de 0,29 €, un signe fort dans une stratégie axée sur le pouvoir d’achat et la conquête de clientèle.

Une promo symbolique mais stratégique

Lidl et Aldi affichent 0,29 € la baguette, un prix vu pour la dernière fois en 2022, lors d'une promotion généralisé chez Leclerc. Cette opération, initiée à l’occasion de la rentrée, s’inscrit dans une campagne « prix sacrés », selon Thomas Braun, directeur des achats chez Lidl : « Cette baguette à 29 centimes s'inscrit dans une campagne 'prix sacrés' … nous sommes les moins chers du marché ».

Ce tarif symbolique permet de capter l’attention des consommateurs dès l’entrée en magasin. Michel-Edouard Leclerc évoque lui aussi ce positionnement stratégique : « 0,29 €, c'est le prix promo dans pas mal de Leclerc et c’est aujourd’hui l'un des thèmes de campagne de Lidl et Aldi ».

29 centimes la baguette, est-ce vraiment une bonne affaire ?

Un an plus tôt, l’UFC‑Que Choisir soulignait que le prix de la baguette a baissé de 5 centimes en grande distribution, pour atteindre environ 0,55 à 0,60 € en moyenne en 2025, poids moyen ~250 g. En parallèle, le prix en boulangerie a augmenté de 2 centimes, pour culminer autour de 1,09 € (240 g).

Un tel écart—plus du double entre GMS et boulangerie traditionnelle—met en lumière le rôle de la baguette comme produit d’appel. Il est devenu un levier pour orienter le consommateur vers d’autres achats en magasin, au-delà du simple pain.

Pourquoi un tel prix est-il possible ?

Plusieurs raisons techniques expliquent la capacité des enseignes à casser les prix :

• Le coût de la farine ne représente que 15 à 20 % du coût total de production, minimisant l’impact sur la marge.

• Les cours du blé ont diminué : 190 €/tonne en 2025 contre 230 € en 2023, ce qui allège les coûts.

• L’industriel bénéficie d’économies d’échelle, automatisation, achat en volume, et main‑d’œuvre moins chère comparativement aux boulangers artisanaux.

Résultat : la grande distribution peut se permettre d’amortir une baguette vendue à 0,29 €, en s’appuyant sur des volumes très élevés.

Ce que gagnent les consommateurs

Le retour à ce prix plancher accentue la fracture entre GMS et artisans. L’UFC‑Que Choisir signale que : « en 1 an, le prix de la baguette a baissé de 5 centimes dans les supermarchés, tandis qu’il a augmenté chez les artisans indépendants ».

Or, si pour le consommateur cette offre constitue un gain immédiat, elle fragilise une filière déjà en tension, confrontée à la hausse des matières premières et de l’énergie. Les boulangers n’ont pas les mêmes marges ni les ressources techniques pour répondre à ce niveau de prix.

Quel poids pour la baguette dans les ventes ?

Même si la baguette n’est plus toujours le produit le plus vendu (notamment dans les repères symboliques), elle reste un indicateur fort du panier quotidien. Les grandes enseignes l'utilisent comme étendard de leur politique tarifaire. Historiquement, Leclerc l’avait déjà bloquée à 0,29 € début 2022. À l'époque, il s’agissait d’un prix moyen unifié, variant entre 0,22 € et 0,35 €. 

En volume, la baguette vendue en supermarché occupe une part croissante du marché du pain. Selon l’UFC-Que Choisir, plus d’une baguette sur deux achetées en France provient désormais de la grande distribution, contre une majorité artisanale il y a encore dix ans. Cette évolution illustre la montée en puissance du rayon boulangerie des enseignes, souvent ouvert sept jours sur sept et proposant une cuisson en continu. À l’inverse, les boulangeries traditionnelles conservent leur force sur la diversité et la qualité perçue, mais voient leur clientèle s’éroder, en particulier dans les zones périurbaines où le supermarché concentre l’essentiel des achats de pain.