Et si demain l’Allemagne s’éclairait à l’énergie solaire… et pas nous ?

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Par Michaël Seys Modifié le 29 novembre 2022 à 9h17

Si le solaire photovoltaïque, lors de la Conférence Environnementale de septembre, n’a tenu qu’une place modeste sur l’ensemble des mesures annoncées, on retiendra cependant dans le discours de clôture du Premier ministre une forme de prise de conscience des erreurs qui ont été faites dans le passé.

Le gouvernement a sans doute enfin pris la mesure que changer trop souvent et brutalement les règles ne créait pas les conditions favorables à l’établissement d’une vraie filière. En effet, les industriels ont avant tout besoin de stabilité, or une telle situation chaotique ne donne pas la confiance nécessaire aux investisseurs pour créer des plans stratégiques à plus long terme.

La France a pris un retard important pour la création de valeur autour du marché du photovoltaïque ; il n’existe pas de grand fabriquant français. La valeur ajoutée se trouve ailleurs, en particulier dans une meilleure intégration du photovoltaïque. Ces enjeux sont d’ailleurs les mêmes pour les autres pays européens. Il ne s’agit plus seulement de produire des centrales, mais de les combiner avec d’autres sources d’énergie, avec des mesures d’économie, d’isolation, etc.

Si les intentions de la feuille de route sont louables, elles manquent d’une vision industrielle. Rien dans ce rapport ne suggère une véritable intention de créer des partenariats public/privé. L’Allemagne a opéré un rapprochement entre la recherche publique et l’industrie privée pour faire éclore un projet industriel qui vise une production de 50 000 à 70 000 MW d’ici 2020. En France persiste le sentiment d’avoir d’un côté les laboratoires de recherches publics qui développent de belles technologies sans applications industrielles, et de l’autre, des industriels qui, dans un contexte de crise, ont des difficultés à investir dans l’innovation.



Malgré cette prise de conscience apparente des erreurs du passé, il n’est donc pas évident que les acteurs du photovoltaïque en France aient été convaincus par le message du gouvernement. A court terme, pour redonner confiance à tous les acteurs de la filière : investisseurs nationaux, installateurs, grand public… il faut faire progresser la compréhension des objectifs et du bien-fondé d’une filière photovoltaïque intégrée au sein d’une politique énergétique plus vaste.

A ce titre, les démarches d’une association indépendante, impliquant fabricants, distributeurs et installateurs comme InSoCo prend son importance. De nos jours tout passe par la communication et l’explication. Il est nécessaire de sensibiliser les consommateurs sur le fait qu’investir dans le solaire va au-delà d’une simple réduction de sa facture d’électricité ; c’est une création de richesse et de valeur pour l’avenir. Une préoccupation partagée par le gouvernement et qui doit valoriser les acteurs ayant une vraie conscience écologique.

A plus long terme, il faudra probablement prendre des mesures au niveau européen. En Italie par exemple, le marché du photovoltaïque a explosé l’année dernière, suite à l’installation de 7GW, mais on s’attend en 2013 à un très gros coup de frein. De tels à-coups ne servent qu’à créer des bulles spéculatives dès lors que les politiques ne sont pas harmonisées.



Pour assurer la stabilité de notre industrie, il conviendrait donc d’avoir une politique européenne mieux synchronisée. L’Europe pourrait également établir de vrais critères de développement durable et social sur l’industrie photovoltaïque. Sur ce marché très dominé par la Chine, la production ne doit pas se faire au détriment du respect des normes environnementales et du droit du travail. Il faut construire de bout en bout une chaîne écologique, depuis la création du produit jusqu’à son utilisation, voire son recyclage.


Dans le même ordre d’idée, les nouveaux appels d’offres qui vont être lancés en France ne devraient pas se focaliser sur le "moins-disant" : des critères sociaux ou écologiques doivent être pris en compte tout en restant "pragmatique", simple et sans détour. En élargissant le débat, une autre idée intéressante de la feuille de route est la réhabilitation des logements sociaux en termes énergétiques. Revoir en profondeur la consommation de l’habitat social prend beaucoup de sens.

On ne peut pas accepter de subventionner le photovoltaïque uniquement pour les foyers qui en ont les moyens. Nous devons apprendre à gérer l’habitation comme un tout et non comme un ensemble d’éléments séparés. Au Japon, des solutions existent déjà pour permettre de gérer tous les acteurs de l’habitat de façon à optimiser les consommations.

En conclusion, il nous faut aller vers une vision globale – au sens géographique, technologique et économique – pour construire durablement cette filière d’avenir.

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Michael Seys est Responsable du développement produit photovoltaïquepour Panasonic Solar, et spécialisé sur les marchés français et Bénélux. Né en 1977, il possède un diplôme d’ingénieur de Supélec. Après avoir travaillé pendant six ans pour le Groupe Saint-Gobain, il a rejoint Sanyo (maintenant Panasonic) en 2010.

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