Facebook : une chute en Bourse révélatrice

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Par Nicolas Tarnaud Modifié le 8 août 2018 à 8h53
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600 millionsLes investisseurs institutionnels possèdent 600 millions d'actions Facebook.

La réalité dépasse parfois la fiction. Le décrochage de Facebook au Nasdaq s’est bien produit. En effet, jeudi 26 juillet 2018, l’action Facebook a perdu 19% de sa valeur soit près de 120 milliards de dollars en une seule séance. C’est un peu plus que la valeur en Bourse de Sanofi.

Les investisseurs n’ont pas apprécié les résultats trimestriels du géant américain. La sanction fut immédiate. Avant la chute, la capitalisation de Facebook était de 618,5 milliards de dollars, soit l’une des plus grosses valeurs à la bourse américaine. 24 heures plus tard, l’entreprise ne valait plus que 500 milliards de dollars. Il faut remonter au 22 septembre 2000 où Intel avait perdu 90 milliards de dollars en une séance. Avec l’inflation, les 90 milliards de dollars de 2000 ne correspondent-ils pas aux 124 milliards de dollars d’aujourd’hui ? Mark Zuckerberg avait prévenu que les marges de son groupe allaient baisser dans les prochaines années. Le marché, impatient, a donc réagi immédiatement. De nombreux fonds sont devenus massivement vendeurs durant la journée du 26 juillet.

Des investisseurs déçus

Selon Facebook, 2,23 milliards d'utilisateurs se connectent sur la plateforme chaque mois. Un chiffre en hausse de 11% sur un an. Le groupe a également annoncé 1,47 milliard d'utilisateurs connectés chaque jour. Les marchés s'attendaient à une meilleure croissance du nombre de ses utilisateurs, un critère important pour les analystes financiers et les gérants de fonds. Les analystes espéraient 2,25 milliards d'utilisateurs actifs par mois et 1,48 milliard par jour durant le deuxième trimestre 2018. Par ailleurs, le site Mashable a révélé que le nombre d’utilisateurs européens quotidiens avait baissé de trois millions au cours du deuxième semestre, passant de 282 à 279 millions. Cette première baisse, depuis le lancement du réseau social, pourrait en partie être la conséquence de la mise en place du Règlement général sur la protection des données (RGPD) le 28 mai dernier dans toute l’Europe. Une note positive est à noter. Le bénéfice net de Facebook est en augmentation de 31% à 5,1 milliards de dollars ce deuxième trimestre. Un chiffre dépassant les attentes des acteurs et observateurs aux États-Unis et dans le reste du monde, confirmant ainsi que Facebook était toujours une cash machine malgré une baisse du nombre de ses membres.

Les relais de croissance

Aujourd’hui, avec un nombre d'utilisateurs stagnant en Occident, Facebook doit trouver des relais de croissance dans d'autres régions du monde. Le monde entier n’est pas encore connecté à Internet. Facebook autant qu’Alphabet s’intéressent au sujet depuis quelques années. Aujourd’hui, plus de 3 milliards de personnes n’ont pas accès à un Internet. Le réseau social de Menlo Park veut donc apporter le haut débit aux régions du monde les moins bien pourvues en infrastructures. Selon la revue américaine Wired, Facebook travaillerait sur le projet de satellites à basse altitude appelé Athena. C’est un projet en cours d'expérimentation. Il consiste à déployer de petits satellites en orbite basse pour apporter de la couverture et permettre aux futurs utilisateurs d’accéder à Internet et au réseau social californien. Cette prouesse technologique ne pourra pas être opérationnelle avant plusieurs années. Selon les experts scientifiques, un minimum de 5 ans sera nécessaire pour la réalisation de ce projet.

Que devons-nous en conclure ?

Premièrement, les leaders de la Tech mondiale sont également soumis à la pression courtermiste des investisseurs comme toutes entreprises cotées sur le marché américain. Au moindre résultat financier décevant, les investisseurs sanctionnent immédiatement l’entreprise quels que soient les enjeux qui en découlent : l’effet domino produit sur le marché concerné et les entreprises du secteur.

Deuxièmement, la capitalisation des GAFAM s’est construite sur des anticipations de taux de croissance de chiffres d’affaires et de bénéfices très élevés.
Or, tôt ou tard, les résultats de ces entreprises peuvent connaître un ralentissement lié à une baisse d’activités ou à un changement de stratégie. Cette-ci doit être financière et non industrielle.

Par exemple, elles peuvent augmenter le budget de la recherche et du développement en distribuant moins de résultats. Les grands actionnaires préfèrent les stratégies financières aux stratégies industrielles. Ces dernières consomment des fonds propres et du temps.

Troisièmement, les actionnaires ont également des enfants. Ainsi, ils se rendent compte qu’ils utilisent davantage Snapchat au détriment du réseau social de Menlo Park. Moins d’utilisateurs actifs aujourd’hui correspond à moins de recettes publicitaires demain et moins de résultat à terme.

Quatrièmement, il sera intéressant d’observer comment les 5 plus gros investisseurs institutionnels possédant près de 600 millions d’actions Facebook réagiront dans les prochaines semaines. Vont-ils se renforcer ou alléger leur allocation dans cette action ?

Cinquièmement, Facebook va-t-il devoir accélérer l’achat de nouvelles entités comme Bloomsbury AI acquise le 3 juillet 2018 dernier pour assurer sa croissance externe ?

En guise de conclusion, les prochains mois nous confirmeront si la correction de l’action Facebook le 26 juillet 2018 fut un accident de parcours ou non.

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Nicolas Tarnaud, FRICS, économiste, professeur à Financia Business School, chercheur associé au Larefi Université Bordeaux IV.

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