Guerre des changes : un prélude à l’effondrement des monnaies

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Par Charles Sannat Publié le 6 février 2013 à 6h18

C’est la nouvelle superproduction mondiale de 2013. La guerre des monnaies se déchaîne sur tous les écrans du monde. En réalité elle n’a jamais cessé depuis 2010-2011, moment où elle a commencé.

Pour ceux que l’histoire et l’effort de mémoire intéressent vous pourrez lire ici un article datant de janvier 2011. La guerre des monnaies a été occultée depuis deux ans pour une raison simple. Il y avait beaucoup d’autres sujets encore plus importants ou plus graves (à vous de choisir) à traiter dans l’actualité économique. L’euro allait-il exploser ? Les Etats allaient-ils faire faillite ? La croissance allait-elle repartir et nous sauver enfin des affres de la récession ? Les banques allaient-elles être sauvées ou allaient-elles toutes s’effondrer en nous entraînant avec elles ?

Alors, franchement, savoir si une monnaie est un peu plus dévaluée que sa voisine ne présentait pas un intérêt majeur. En réalité rien n’a beaucoup changé depuis le début des hostilités. Simplement nous occultons, nous oublions et un sujet chasse l’autre, la vitesse de l’information étant maintenant une évidence pour tous. Nous sommes plus que jamais dans l’immédiat. Mais l’immédiat empêche de voir le tableau d’ensemble, l’essentiel.

La guerre des monnaies c’est en réalité la baisse des monnaies

Voilà l’essentiel, voilà l’idée qu’il faut retenir. Pour améliorer la compétitivité de manière factice, les Etats jouent sur la valeur de leur monnaie en en imprimant suffisamment pour que sa valeur baisse. Le problème c’est qu’en dehors de l’Europe et de l’euro… tout le monde fait la même chose. C’est donc l’histoire de parachutistes qui, même s’ils n’ont pas sauté exactement au même moment de l’avion,… arriveront quand même tous au sol.

C’est donc un jeu économique stupide et sans intérêt qui ne fait que révéler le manque d’idées de nos autorités économiques et politiques totalement dépassées par la crise économique actuelle. Cela participe plus de manœuvres désespérées que d’une stratégie brillante qui aurait des chances de réussite. La guerre des monnaies ne peut mener qu’à l’anéantissement des monnaies actuelles… mais c’est de toute façon, compte tenu du niveau d’endettement atteint partout dans le monde, désormais inéluctable.

Plusieurs limites

La guerre des monnaies c’est un peu comme l’arme nucléaire. Si tout le monde l’utilise sur son voisin qui lui-même riposte…. C’est la destruction mutuelle assurée. L’homme n’ayant jamais fait preuve de sagesse, la seule raison pour laquelle personne n’atomise son voisin c’est bien la peur de se faire atomiser à son tour. Dans une guerre nucléaire, il n’y aurait pas de vainqueur. Que des perdants.

Il en va de même pour la guerre des monnaies. A l’arrivée, des monnaies qui ne valent plus rien. Vouloir supprimer toute valeur à sa monnaie n’est pas franchement une bonne idée. Raison pour laquelle ce phénomène trouvera naturellement des limites. Le renchérissement des importations est également un obstacle auquel est confronté un pays comme le Japon par exemple, mais pas au hasard puisque c’est l’Empire du Soleil Levant qui vient de relancer les hostilités récemment, et depuis Fukushima et l’arrêt de nombreuses centrales nucléaires totalement dépendant de ses importations de pétrole de gaz et de charbon pour répondre à ses besoins énergétique.

Une croissance de l’activité économique japonaise, qui reposerait sur une baisse de la valeur du yen, entraînerait mécaniquement une très forte de hausse des importations de matières premières quelles qu’elles soient ce qui aurait pour conséquence… de réduire la compétitivité nippone. Là aussi la guerre des monnaies trouvera ses limites de façon assez rapide. La baisse des monnaies n’est qu’un bol d’air économique de court terme. On ne peut pas baser une politique économique, de croissance et de compétitivité durable sur ce genre de stratégies… sauf quand on a épuisé toutes les autres solutions.

Vers l’effondrement des monnaies

A mon sens cette guerre des monnaies doit donc être vue non pas pour ce qu’elle semble être, à savoir la recherche d’une « dévaluation monétaire de compétitivité », mais une érosion de plus en plus marquée de la valeur intrinsèque des principales monnaies. Le Royaume-Uni avec sa livre sterling, les Etats-Unis avec leur dollar, ou encore le Japon avec son yen, sont tous les trois des pays surendettés et insolvables. Leur monnaie tendra donc progressivement vers 0. Cela signifie deux choses. La première c’est que la Guerre des Monnaies va se poursuivre jusqu’à ce que tous les parachutistes aient atteint le sol. La deuxième chose, c’est que lorsque toutes monnaies ne vaudront plus tripette, il faudra réinventer un nouveau système monétaire international.

La guerre des monnaies occulte donc l’essentiel à savoir que les monnaies que nous connaissons et que nous utilisons sont condamnées.

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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