Le procès dure depuis tellement d’années qu’entre temps, le fondateur et président du groupe pharmaceutique français, Jacques Servier, est décédé. Mais cela n’a pas empêché pas la justice de poursuivre son travail. Et de condamner, pour la première fois, le laboratoire coupable.
Un médicament défectueux et dangereux
Deux personnes à qui le médicament Mediator a été prescrit en 2003 et 2006 ont obtenu que l’entreprise Servier soit condamnée. Le tribunal de grande instance de Nanterre a en effet reconnu, pour la première fois, la responsabilité civile de l’entreprise pour avoir laissé sur le marché un médicament "défectueux".
Le Mediator est un médicament indiqué dans le traitement du diabète et souvent prescrit comme coupe-faim. Cette démarche n’est pas illégale en soi. Encore faut-il que le patient soit averti de la reconversion du médicament, comme l’exige la loi. Le Mediator aurait provoqué la mort de cinq cents à deux mille personnes en France depuis sa commercialisation en 1976.
Il avait été retiré du marché suisse dès 1979, espagnol en 2003 et italien en 2004.
Des autorités sanitaires trop silencieuses
D’après les avocats des deux victimes, "les laboratoires ne pouvaient plus ignorer qu’il y avait une balance bénéfices-risques défavorable à laisser le médicament sur le marché". De fait, plusieurs études avaient en outre montré qu'il était inefficace et dangereux dès les années 1990. Mais les autorités sanitaires françaises ont préféré fermer les yeux, pour de multiples raisons.
Il aura fallu la ténacité d’un médecin, le docteur Irène Frachon, pour que le scandale éclate au grand jour. Et que des victimes osent demander réparation.
A ce jour, aucune victime du Mediator n’a encore été indemnisée de manière définitive par la voie judiciaire. Malgré tout, le laboratoire assure avoir provisionné 70 millions d’euros pour indemniser la totalité des victimes et leurs caisses d’assurance maladie.
Il faut savoir que les Français sont les plus gros consommateurs de médicaments au monde. 90% des consultations françaises se concluent par une ordonnance, contre 72% en Allemagne. Une personne dépensait en moyenne cinq cent cinquante six euros par an en médicaments en 2009, soit six fois plus qu’en 1980. Et ce alors que le prix du médicament est moins élevé que chez nos voisins européens, et qu’il a même baissé avec l’arrivée du générique.