Pour sauver les agriculteurs, il est urgent et impératif d’augmenter le pouvoir d’achat des Français

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Par Daniel Moinier Publié le 15 mars 2017 à 5h00
France Agriculture Pouvoir Achat Francais
1,5 milliard ?La Commission européenne a déboursé 1,5 milliard d'euros pour stabiliser les marches agricoles les deux dernières années.

Depuis de très nombreuses années le pouvoir d’achat des agriculteurs ne cesse de baisser et cela malgré les aides de la PAC. (Politique Agricole Commune) !

Charles Wyplosz(1) annonce qu’au lieu de distribuer des aides, le gouvernement pourrait cesser de rendre la vie des agriculteurs plus difficile par l’imposition de règles trop nombreuses. Les crises se suivent et se ressemblent. Mais peut-on parler de crises, alors que la baisse du pouvoir d’achat est continue depuis de très nombreuses années. Il est vrai que tous les gouvernements, politiques recherchant un capital de sympathie auprès des français, se sont toujours lancés dans des opérations de communication et de « bricolage » qui n’ont jamais arrêté la chute tant des prix que du pouvoir d’achat, ce qui bien sûr est lié. Et pourtant, ils ont fait de gros efforts de rationalisation, de concentration. Ils sont devenus au fil du temps de véritables chefs d’entreprises qui communiquent avec un monde qu’ils ne connaissaient pas ou peu auparavant : le commerce local, les industriels... La plupart ont du matériel de plus en plus performant, à la pointe de la technologie, internet, gps, etc…, ont fait des investissements colossaux au regard de leur chiffre d’affaire. L'effet le plus pervers de la PAC est que nombre d'agriculteurs dépendent pour leur survie, de subventions qui les empêchent de raisonner en termes de marché. La concurrence au fil des années s’est fortement accentuée tant au niveau de l’Europe que des pays d’autres continents.

Autre aspect négatif, lorsque la situation devient difficile, leur réaction instinctive est de s'en prendre aux pouvoirs publics pour demander plus de subventions, ce qui les éloigne encore plus des conséquences de leurs décisions. Les gouvernements semblent croire que la solution est de s'immiscer dans les négociations entre producteurs et acheteurs, ce qui les amène à parcourir toute la chaîne de transformation jusqu'aux supermarchés. Chacun de ces acteurs a ses propres logiques industrielles et commerciales. Décider qui sont les bons et qui sont les méchants est parfaitement stérile, et même dangereux. Stérile parce qu'il est illusoire de chercher à imposer des prix dans des marchés volatiles. Dangereux parce qu'inévitablement le gouvernement se trouve pris entre des groupes de pression, ce qui l'amène à glisser de la logique économique à la logique politique, garantie de solutions inefficaces et coûteuses.

D’un autre côté, la commission européenne par la voix du Commissaire irlandais à l’Agriculture Phil Hogan, « s’efforce de minimiser l’impact de la crise agricole française du mieux que nous pouvons. Nous avons eu deux années très difficiles, conséquence de l'embargo russe, de l'offre mondiale trop abondante et de la surproduction dans les secteurs du lait et de la viande de porc ». La Commission Européenne pour stabiliser les marchés, a déboursé 1,5 milliards d’euros à plusieurs reprises. Une mesure aide toujours les producteurs français, c’est celle de la possibilité de stockage qui a été prolongée jusqu’en juin même s’il n’y a aucun stockage depuis septembre 2016. C’est une autre manche pour le marché de la viande de bœuf qui souffre beaucoup du fait de la vente de vaches laitières en quête de rentabilité. Pour essayer d’enrayer cette difficulté, la Commission a mis à disposition un budget de 133 millions d'euros pour en assurer la promotion en 2017, en hausse de 20% par rapport à l'année précédente.

Analyse et Constat

Le problème des agriculteurs, c’est comme celui du chômage, des déficits des caisses de sécurité sociale, de retraites, d’Assedic,… les gouvernements successifs n’ont pas trouvé d’autres moyens que d’installer des rustines. Elles n’ont fait que reculer les échéances, diminuer provisoirement la grogne, les revendications. Mais elles ont aussi longtemps masqué le vrai problème de base qui n’a jamais été pris en compte puisqu’il n’est pas simplement lié à l’agriculture, ni aux autres branches, mais à un manque de vision et d’initiatives globales des différents gouvernements successifs. Alors que manque t-il pour que cette agriculture, et pas que, se sorte de l’impasse où elle se trouve ?

Comme il est dit dans le titre, il suffirait d’augmenter substantiellement le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Et comment le booster ? Par l’augmentation des rémunérations. Pas par celle du Smic, qui enterrerait encore un peu plus les entrepreneurs, mais par plus de travail, c'est-à-dire par plus d’heures travaillées. Quel candidat osera mettre en place ce challenge ? Pas Benoit Hamon qui veut plutôt faire l’inverse, aller vers les 32 heures, pas Marine LE PEN qui reste aux 35 heures, mais veut revenir à des départs en retraite à 60 ans. Pour Emmanuel Macron, il veut assouplir les 35 heures par des « accords négociés majoritaires ». En ce qui concerne François Fillon, il propose de supprimer la durée légale, ce seront les entreprises qui définiront le seuil de déclenchement des heures supplémentaires par le biais d’accords avec les syndicats et une durée maximale de 48 heures semaine selon la convention européenne. D’autre part les départs en retraite seraient repoussés à 65 ans, sachant que chaque année de travail en plus au-delà de 60 ans, c’est 65 milliards de plus dans l’économie.

Mais l’idéal pour les caisses de l’état et toutes les autres, ce serait vraiment le retour aux 40 heures, avec une base identique pour tous. En plus c’est idéal pour toutes les professions pratiquant les 3 X 8, 4 X 8, 5 X 8, feux continus pour gérer efficacement les horaires. Il faut rappeler que pour une personne au Smic passer de 35h à 40h, c’est 200 euros de plus par mois. Pour les entreprises industrielles, c’est la possibilité d’augmenter leur marges jusqu’à 14%, ce qui est loin d’être négligeable quand on sait que celles-ci sont les plus faibles d’Europe. Il y a peu, elles étaient de 28,5 % alors qu’en Allemagne elles se situaient à 41%. Une des causes de leurs succès à l’export, avec aussi des charges plus faibles de près de 10% et même jusqu’à 13% pour les entreprises ne bénéficiant pas d’exonération fiscales sur les bas salaires. Ce qui est d’ailleurs très interdépendant. Le pouvoir d’achat ainsi généré, permettrait à nos concitoyens de dépenser mieux et moins low cost, d’où l’achat de produits plus chers. Donc de meilleures marges tant pour les industriels de l’agroalimentaire qui pressuriseraient beaucoup moins les agriculteurs, ce qui augmenterait leur marge. Tout est lié.

(1) Charles Wyplosz est Professeur d'économie à l'Institut de hautes études internationales et du développement de Genève et membre du groupe d'économistes indépendants conseillers auprès du président de la Commission européenne

www.livres-daniel-moinier.com

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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