La marchandisation ou un véritable service public ?

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Par Dominique Watrin Publié le 12 mars 2014 à 5h30

Depuis 2008-2009, 10 000 emplois ont été supprimés dans le secteur de l’aide à domicile. Un « plan social » passé totalement inaperçu bien que correspondant à 3 PSA-Aulnay. Alors que le vieillissement de la société s’accélère, le nombre d’heures APA (l’allocation personnalisée d’autonomie) effectuées à domicile stagne. Le secteur des services à la personne présenté par certains comme une alternative aux suppressions d’emplois industriels est à la peine.

À qui la faute ? Passé sous silence, appliqué avec 2 à 3 ans de décalage parfois plus selon les départements, le décret Raffarin du 28 mars 2003 a sensiblement alourdi la participation des bénéficiaires dans le cadre des plans d’aide APA. Dans un contexte de réduction du pouvoir d’achat, particulièrement celui des retraités, beaucoup renoncent aux heures d’accompagnement auxquelles ils ont droit ne pouvant plus supporter le reste à charge.

Confrontées aux difficultés financières, aux nécessités de la professionnalisation, au resserrement des finances des conseils généraux (eux-mêmes confrontés à la baisse des compensations de l’État), à l’explosion du nombre de structures, notamment privées (depuis l’ouverture à la concurrence du secteur par la loi Borloo du 26 juillet 2005), certaines associations ne trouvent d’autres solutions que d’augmenter leurs tarifs et de précariser encore un peu plus leurs salariés. Pourtant, cette « violence sociale » subie par des centaines de milliers de femmes (98 % des salariés sont des salariées) ne semble guère émouvoir, y compris les féministes.

Souvent recrutées avec un faible niveau de qualification, ces salariées sont en même temps confrontées :l Aux difficultés d’un métier accompli auprès de personnes fragiles (et donc au stress), à des amplitudes de travail journalier (pouvant aller jusqu’à 13 h par jour) et au travail du week-end. l À des rémunérations sous la base du SMIC (valeur du point non revalorisé depuis 2009). Au temps partiel quasi généralisé alors que plus de 40 % d’entre elles voudraient travailler plus. Au dédommagement des frais professionnels (utilisation du véhicule et du portable personnel) inexistant ou faible. Au peu de perspectives d’évolution de carrière…Il faut d’abord s’interroger sur l’existence d’une réelle volonté politique de réduire la précarité de ces salariés. Durant le débat sur l’ANI, la droite et les socialistes se sont retrouvés pour refuser aux aides à domicile le bénéfice de la règle commune d’un contrat de travail minimum de 24 heures. La droite a voulu sanctuariser cette exception.

Le PS renvoie à la souplesse de la convention collective. Parallèlement, les différents cahiers des charges pour l’autorisation ou l’agrément des structures, la certification, les modes de tarification des conseils généraux, continuent à ignorer superbement les conditions de travail et de qualification de ces salariées pourtant gages de la qualité du service rendu. En résumé, le système actuel, où règne la marchandisation au lieu d’un véritable service public prenant en compte les aspirations des bénéficiaires et des aides à domicile, n’est ni gérable ni viable à terme.

Une vraie réforme passe par la mise en place dans les meilleurs délais d’une vraie politique publique de la prise en charge de la perte d’autonomie. La loi d’adaptation de la société au vieillissement de la population reprendra-t-elle ces enjeux ? En l’état non. Cette loi d’orientation qui doit être présentée au Parlement courant 2014 prétend poser un acte II de l’APA sans d’abord solutionner les dérives de l’acte I. Elle constitue pourtant une opportunité pour exiger que soient mises en débat toutes les questions posées. Déjà, la commission des affaires sociales du Sénat, présidée par Annie David s’est honorée en initiant une mission d’information sur la problématique des services d’aide à la personne, mission qui a déjà commencé ses travaux et dont je serai co-rapporteur avec le sénateur J-M Vanlerenberghe (UDI)

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Sénateur du Pas-de-Calais. 

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