Le rêve américain remporte une nouvelle fois la mise

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Par Stéphanie Villers Modifié le 20 décembre 2016 à 15h19
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0,75%Le 14 décembre 2016 la FED a relevé son taux directeur de 0,25 % à 0,75%.

Les Etats-Unis vont-ils recevoir indéfiniment un chèque en blanc du reste du monde ?

La Réserve Fédérale a annoncé la couleur, exit la période des taux d’intérêt faibles. Voici venu le temps de la normalisation monétaire. En d’autres termes, les taux d’intérêt américains vont augmenter, entraînant dans leur sillage ceux du reste du monde.

Heureusement, en zone euro, la BCE veille au grain. Elle a décidé de prolonger son action sur les marchés obligataires pour empêcher de « tuer la reprise du crédit dans l’œuf ». Rappelons qu’elle a déjà consacré 1400 Mds d’euros au programme d’assouplissement quantitatif depuis son lancement en mars 2015. L’économie européenne, encore en convalescence, n’est pas prête à supporter le poids de taux d’intérêt trop forts. L’activité reste poussive, les investissements atones. En 2017, une page se tourne pour la zone euro. Les planètes ne seront plus alignées comme par le passé, le cours du baril de pétrole devrait se ressaisir et les consommateurs européens risquent d’en faire les frais. Il n’y a rien à attendre sur le front de l’emploi, même si le chômage commence sa lente décrue, les revalorisations salariales ne seront toujours pas d’actualité. Le pouvoir d’achat des ménages devrait être contraint par la hausse du prix de l’énergie et des matières premières.

Etats-Unis / zone euro : deux poids, deux mesures

L’écart de croissance entre les Etats-Unis et l’Union Européenne risque de se creuser davantage en 2017. La dichotomie entre les deux zones est de plus en plus prégnante. Pourtant, début 2016, nombreux étaient les experts européens (français surtout) à avoir vendu la peau de l’ours... Selon ces derniers, la croissance en zone euro devait repartir, grâce à l’investissement, stimulé par la conjonction inédite de facteurs positifs. En fin d’année, triste bilan. A peine peut-on se réjouir d’avoir passé la crise. A contrario, aux Etats-Unis, tout s’est mieux passé que prévu. Alors que l’activité américaine devait subir les contre-performances de son secteur pétrolier en déliquescence et d’un dollar fort pénalisant ses exportations, la croissance a réussi à tenir bon toute l’année. Pourtant, après 6 ans de hausses du PIB sans discontinuité, la croissance américaine devait finir par s’essouffler. Mais, le mirage Trump est arrivé. Et les cartes ont été redistribuées… La relance budgétaire prévue à partir de 2017 devrait stimuler de nouveau l’activité. Le taux d’imposition des entreprises et des hauts revenus devraient baisser massivement. Des ponts, des routes devront être construits ou modernisés, et les usines devraient être relocalisées sur le territoire américain. Voilà pour les promesses électorales du futur Président.

Soumission financière

Alors que ce plan inspiré de recettes surannées peut laisser perplexe, tout le monde l’achète, les marchés financiers en premier. Personne ne remet en cause la capacité des Etats-Unis à se financer. Pourtant, la dette publique américaine risque de s’emballer pour soutenir ces mesures de relance de $1000 mds dans les infrastructures dont on attend les modalités de mise en oeuvre. Donald Trump évoque un partenariat public/privé sans en avoir dévoilé les clefs de répartition. Mais, quel que soit le montant de l’investissement public, les Etats-Unis, faute de réserves, n’auront d’autres choix que de faire appel aux marchés pour financer leur projet. Les chinois, principaux investisseurs étrangers en bons du trésor américain, auront ainsi leur mot à dire et pourraient, en théorie, faire capoter les ambitions du Président américain élu si son protectionnisme s’avérait trop « excessif ». D’autant qu’ils ne sont pas les seuls à pouvoir le faire, les japonais et les européens qui ont jusqu’à présent placé docilement leur épargne dans les obligations américaines, pourraient trouver à redire si la politique extérieure de Trump dépassait les bornes. Eriger des barrières douanières freinera de facto le commerce mondial.

« Et pendant ce temps-là, le reste du monde pompait, pompait »

Rappelons-nous qu’au moment des élections américaines, tout le monde criait au loup : la victoire de Trump n’était pas envisageable. Son programme économique reposait sur des promesses fallacieuses. Pour autant, depuis le 9 novembre, les perspectives économiques n’ont en rien été modifiées, bien au contraire, elles ont été révisées à la hausse par la plupart des organismes internationaux. Comment comprendre ce revirement ? Comment expliquer que le gagnant se trouve toujours du même côté de l’Atlantique ? Le reste du monde, la zone euro en tête, choisit invariablement de financer le rêve américain. Un soutien qui se paie très cher en points de croissance localement.

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Stéphanie Villers est économiste.

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