Les œufs importés d’Ukraine s’invitent discrètement dans les rayons français, attisant l’inquiétude des professionnels qui redoutent des pratiques agricoles éloignées des normes européennes et des risques pour la santé publique.
Oeufs ukrainiens : la filière française alerte sur des risques sanitaires et économiques

Depuis la fin du mois d’août 2025, le débat sur les œufs occupe une place centrale dans le secteur agricole français. Alors que la consommation progresse de 5 % en volume à fin juillet 2025 selon les données de l’interprofession, l’arrivée d’œufs ukrainiens dans plusieurs enseignes de distribution soulève des interrogations pressantes. La raison ? Des réglementations différentes qui autorisent l’usage de certains antibiotiques.
Des œufs en provenance d’Ukraine dans les supermarchés français
L’interprofession française des œufs (CNPO) a confirmé que plusieurs lots originaires d’Ukraine, identifiables par le code « 3 » correspondant aux élevages en cage, ont été repérés en grande surface depuis le printemps. Ils ont notamment été distribués par Carrefour et E. Leclerc, selon la RTBF. Si les volumes restent limités, l’organisation s’alarme du signal envoyé au marché. Yves-Marie Beaudet, président du CNPO, résume : « Qu’on en importe un peu d’Espagne ou d’Italie, ça reste en Union européenne. Mais quand on va chercher en Ukraine, dont les normes ne sont pas en adéquation avec la réglementation européenne, ce n’est simplement pas possible ».
Selon le CNPO, environ 300 000 œufs importés par E. Leclerc ont récemment été recensés, une quantité modeste au regard des 7 milliards produits chaque année en France. Toutefois, cette opération pourrait constituer « peut-être un coup d’essai » de la part des distributeurs, ajoute Yves-Marie Beaudet dans les colonnes de la RTBF. Pour les producteurs, le risque est clair : si ces flux venaient à s’amplifier, ils fragiliseraient une filière française déjà soumise à des coûts élevés et une réglementation très stricte.
Risques sanitaires et non-conformités dénoncés par la filière
Au-delà de la question concurrentielle, les professionnels insistent sur les enjeux de santé publique. Plusieurs contrôles réalisés en juillet et août ont mis en évidence, via le système européen d’alerte rapide RASFF, la présence d’antibiotiques interdits en Europe dans des œufs venus d’Ukraine. Des importations ont même été bloquées à l’entrée du territoire pour ces motifs, selon La Coopération Agricole. Ces découvertes alimentent l’inquiétude des éleveurs français qui dénoncent un double standard de production.
Les craintes se renforcent car la demande des consommateurs est en hausse. Les ventes d’œufs ont progressé de 5 % en volume en 2025 par rapport à 2024, soit environ 350 millions d’unités supplémentaires, d’après le CNPO. Dans ce contexte porteur pour l’alimentation nationale, l’introduction de produits ne respectant pas les standards européens apparaît, selon les professionnels, comme un danger pour la confiance des consommateurs et la santé publique.
Mais, surtout, une concurrence déloyale envers la filière européenne des œufs qui ne peut pas utiliser les mêmes produits pour améliorer le rendement de ses élevages.
Pression concurrentielle et appel à réagir : ce que demandent les professionnels
Pour les producteurs, l’arrivée d’œufs ukrainiens inquiète sur le plan de la survie économique de la filière. Les normes européennes imposent des investissements lourds en matière de bien-être animal et de sécurité sanitaire. Or, importer des œufs issus de systèmes non conformes, notamment de production en cage encore largement répandue en Ukraine, revient à créer une distorsion de concurrence.
Le CNPO demande aux distributeurs de s’engager fermement à ne pas importer d’œufs hors Union européenne, afin de préserver l’équilibre de la filière et de garantir la santé publique. Selon BFMTV, l’interprofession réclame également des clarifications auprès des pouvoirs publics sur les volumes autorisés et demande des contrôles renforcés.
