Invisible mais incontournable, la taxe sur les ordures ménagères gonfle la facture locale des Français. Entre disparités territoriales et recettes excédentaires, son fonctionnement soulève des questions. Payez-vous cette taxe à son juste prix ? Enquête sur un impôt de plus en plus contesté.
Taxe des ordures ménagères : explose-t-elle injustement ?

Depuis le 1er janvier 2025, la taxe sur les ordures ménagères, intégrée à l’avis de taxe foncière, continue de susciter l'incompréhension. Chaque année, les contribuables constatent une hausse notable sans toujours en saisir les rouages. Pourtant, cette taxe, fixée par la commune, finance un service indispensable : la gestion des déchets ménagers. Alors, à quoi sert-elle réellement, et pourquoi son montant varie-t-il autant d’une ville à l’autre ?
Une fiscalité locale qui pèse lourd sur la facture
Bien qu’elle soit souvent considérée comme une ligne annexe sur l’avis de taxe foncière, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) représente une ponction significative sur le budget des ménages. En 2023, elle s’élevait en moyenne à 144 euros par habitant, selon les données publiées par l’UFC‑Que Choisir le 7 mars 2025. Ce montant marque une augmentation de 7 % en un an, et de 20 % depuis 2018, malgré une inflation inférieure sur la même période.
À l'origine de cette progression, plusieurs facteurs s'imbriquent. D’abord, la revalorisation des bases cadastrales : +3,4 % en 2022, puis +7,1 % en 2023, toujours selon l’UFC‑Que Choisir. Ces ajustements automatiques entraînent mécaniquement une hausse de la facture sans que les services rendus n’évoluent. En parallèle, les coûts de collecte et de traitement des déchets ont grimpé de 22 % entre 2020 et 2024, dans un contexte d’augmentation des exigences environnementales.
Mais ce n’est pas tout : la commune peut, à sa discrétion, moduler le taux appliqué. Ce pouvoir contribue aux disparités majeures constatées sur le territoire. Par exemple, le coût de la TEOM atteint 243 euros par habitant à Aix-en-Provence, contre 67,95 euros à Brest, d’après l’enquête menée par Que Choisir.
Derrière la taxe, un rendement parfois excessif
Si l’objectif initial de la TEOM est de couvrir les frais de gestion des ordures ménagères, dans les faits, nombre de communes dégagent un excédent. Le 30 août 2025, RMC révélait qu’à Dijon Métropole, le montant prélevé atteignait 110,32 euros par habitant en 2022, alors que le coût réel du service ne dépassait pas 69,17 euros.
Cette situation n’est pas isolée. Un rapport relayé par Le Monde, basé sur les données de l’ADEME, indique que plus de la moitié des intercommunalités françaises perçoivent une taxe supérieure à leurs dépenses. Certaines vont jusqu’à 130 à 150 % du coût effectif, ce qui interroge sur l’utilisation de cet écart.
La loi autorise une certaine marge, notamment pour constituer des réserves ou financer des investissements liés au traitement des déchets. Toutefois, cette latitude est encadrée. Une utilisation non conforme pourrait contrevenir au principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt. Et surtout, elle nourrit le sentiment d’un prélèvement injustifié chez les contribuables, déjà affectés par la flambée des impôts locaux.
Un impôt opaque, aux règles complexes
La TEOM souffre aussi d’un manque de lisibilité. Elle est calculée à partir de la valeur locative cadastrale du bien immobilier, multipliée par un taux fixé par la commune. Contrairement à la redevance incitative (REOM), elle n’est pas indexée sur le volume de déchets produit, ce qui annule tout effet de responsabilisation individuelle.
Autrement dit, deux foyers produisant des quantités très différentes d’ordures ménagères peuvent payer le même montant, ou même plus pour celui qui trie davantage mais habite un logement mieux situé. Ce fonctionnement est régulièrement critiqué par les associations de consommateurs et les experts en fiscalité locale.
En janvier 2025, le ministère de l’Économie rappelait que la part incitative — lorsqu’elle est appliquée — reste minime, et que seules quelques centaines de collectivités ont opté pour la redevance en remplacement de la taxe. Une réforme structurelle semble pourtant indispensable pour rétablir l’équité, tant sur le plan écologique que fiscal.