C’est la première fois qu’une entreprise doit répondre à des accusations de greenwashing. TotalEnergies est accusée d’avoir largement mis en avant un verdissement de ses activités qui n’a pas été suivi de faits. Il s’agit d’une première pour la justice française.
TotalEnergies accusé de greenwashing : un procès historique en France

TotalEnergies adepte du greenwashing ?
Ce jeudi 5 juin 2025, un procès inédit s’ouvre au tribunal judiciaire de Paris. Pour la première fois en France, une multinationale énergétique, TotalEnergies, est mise en cause pour greenwashing. Autrement dit, pour avoir dissimulé l’ampleur réelle de ses activités fossiles derrière une communication climatique trop bien huilée. L’affaire, portée par trois organisations environnementales, pourrait créer un précédent au niveau européen.
TotalEnergies n’en est pas à sa première manœuvre d’image. En mai 2021, le groupe abandonne « Total » pour devenir « TotalEnergies », et diffuse alors une campagne massive prônant une neutralité carbone à l’horizon 2050. Jusque-là, rien de répréhensible, si ce n’est que les ONG à l’origine de l’assignation, à savoir Greenpeace France, Les Amis de la Terre France et Notre Affaire à Tous, accusent aujourd’hui l’entreprise d’avoir maquillé ses engagements.
Selon Greenpeace France, cette stratégie publicitaire est une « opération de dissimulation industrielle sous couvert de marketing responsable ». Les messages mis en cause présentent le gaz comme une étape vers la transition énergétique, tandis que, dans les faits, 98 % de la production du groupe reste issue des énergies fossiles, selon Les Amis de la Terre. Ce n’est pas une bataille de chiffres, mais de sincérité. En brandissant des promesses vertes, le groupe aurait induit le public en erreur. La plainte s’appuie sur la directive européenne contre les pratiques commerciales déloyales, un levier juridique de plus en plus invoqué dans les affaires climatiques.
L’entreprise invoque la légalité
Du côté de TotalEnergies, la ligne de défense est nette : il ne s’agissait pas de publicité au sens commercial, mais de « communication institutionnelle ». À ce titre, l’entreprise estime que les messages incriminés ne relèvent pas du code de la consommation. Une stratégie juridique habile, mais qui pourrait ne pas suffire.
La société assure que sa transition énergétique est réelle, mesurable et encadrée. Elle souligne que ses contenus ont été validés par l’Autorité des marchés financiers (AMF) et que « les allégations avancées ne sont ni mensongères ni infondées ». Autrement dit : si TotalEnergies embellit la réalité, c’est dans les clous de la loi. Mais ce procès ne porte pas sur le droit boursier : il s’agit d’un test de conformité entre le message et les actes. Et sur ce terrain, la justice pourrait avoir une lecture moins indulgente.
Ce que tentent d’obtenir les ONG n’est pas simplement une condamnation. C’est l’interdiction formelle de toute récidive. Elles demandent au tribunal « l’arrêt immédiat des pratiques commerciales trompeuses », sous peine d’astreinte. La portée dépasse largement le cas français. Depuis deux ans, des procédures similaires émergent dans plusieurs pays de l’Union européenne. Lufthansa, Repsol, KLM : toutes ont été confrontées à la justice pour avoir enjolivé leur empreinte carbone dans leurs messages. La particularité ici ? Le procès de TotalEnergies est le premier en France à cibler une major pétrolière, symbole d’un système accusé de manipuler les codes du développement durable.
