Chaque été, les mêmes critiques resurgissent : l’allocation de rentrée scolaire (ARS) serait détournée pour des achats éloignés de l’éducation, notamment des « écrans plats » pour reprendre les termes d’un certain ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer.
Allocation de rentrée scolaire : non, les parents n’achètent pas n’importe quoi avec

Mais les chiffres contredisent cette idée reçue : l’essentiel de l’allocation de rentrée scolaire (ARS), versée en août, sert bien aux fournitures, aux vêtements et aux frais scolaires.
Allocation de rentrée scolaire : montants et seuils pour 2025
Le mardi 19 août 2025 marque le versement officiel de l’allocation de rentrée scolaire (ARS) en métropole, en Guadeloupe, en Guyane et en Martinique, après un premier virement le 5 août à Mayotte et à La Réunion. Cette aide, revalorisée au printemps 2025, atteint cette année 423,48 € pour les 6-10 ans, 446,85 € pour les 11-14 ans et 462,33 € pour les 15-18 ans, selon le ministère de l’Éducation nationale. Si le débat sur son usage refait surface à chaque rentrée, les études et les enquêtes démontrent que les familles la consacrent bel et bien aux dépenses scolaires.
L’allocation de rentrée scolaire constitue en effet une aide sociale majeure, versée par la Caisse d’allocations familiales (CAF) ou la Mutualité sociale agricole (MSA). Pour être éligibles, les foyers doivent respecter un plafond de revenus fixé à 28 444 € pour un enfant, augmenté de 6 564 € par enfant supplémentaire, sur la base des revenus 2023. Une allocation différentielle existe pour ceux dont les ressources dépassent de peu ces seuils. Comme le rappelait récemment BFMTV, « si les ressources du foyer dépassent de très peu ces plafonds, vous pouvez peut-être prétendre à une allocation de rentrée scolaire différentielle ». En 2025, environ trois millions de foyers perçoivent cette aide.
Les dépenses scolaires : l’ARS ne suffit pas, n’en déplaise à certains
Une enquête menée par la Caisse nationale des allocations familiales en 2023 a établi que les familles dépensent en moyenne 1 315 € par enfant sur une année scolaire complète. Les 400 € de l’ARS couvrent donc à peine un tiers de ce budget. Les frais scolaires ne se limitent pas aux stylos et cahiers : la cantine, les vêtements et le matériel pédagogique représentent une part encore plus lourde.
Le détail est édifiant. Selon la Cnaf, la dépense annuelle par poste s’élève à environ 146 € pour les fournitures, 335 € pour la restauration scolaire et 370 € pour l’habillement. Des chiffres qui confirment que l’allocation est absorbée quasi intégralement dès les premiers achats, et que donc il ne reste pas de quoi acheter des consoles de jeu, des écrans plats, ou partir en vacances aux Seychelles.
La Familles de France rappelle, pour sa part, que les fournitures scolaires ne représentent que 11 % des dépenses globales liées à la scolarité. La réalité contredit donc l’idée que cette aide serait détournée de son objectif initial.
L’ARS utilisée pour les enfants : une réalité depuis toujours
Dès 2013, une vaste enquête Cnaf/OpinionWay auprès de 2 009 bénéficiaires montrait déjà que l’ARS était utilisée quasi exclusivement pour l’éducation. 95 % des parents déclaraient la consacrer aux fournitures, 89 % aux vêtements et 42 % aux services liés à l’école comme la cantine ou l’assurance scolaire. Cette enquête précisait que, sans l’ARS, 73 % des familles auraient réalisé les mêmes achats, mais 41 % auraient réduit la quantité ou la qualité du matériel acquis.
Les montants cités à l’époque illustrent l’ampleur des dépenses : 1 291 € par enfant en élémentaire, 1 439 € au collège et 1 669 € au lycée. Même en 2013, l’allocation ne représentait qu’une fraction du coût total, mais elle permettait aux familles d’éviter des arbitrages trop contraignants sur la qualité des fournitures et des vêtements. Les critiques d’un usage inapproprié apparaissent donc déconnectées des chiffres observés sur la longue durée.
Il faut dire qu’ils ont tendance à oublier un petit détail non sans importance : une dépense reste une dépense. Si une famille a acheté les fournitures en juillet, donc avant le versement de l’allocation de rentrée scolaire, ce n’était qu’en avançant des frais. Ce qu'elle fait alors de son argent en septembre c'est son problème, et n'efface pas la dépense précédente par magie. Et, surtout, les dépenses pour l’éducation se poursuivent tout le long de l’année et englobent bien plus que des stylos et des cahiers.
Allocation de rentrée scolaire : une aide qui structure la rentrée des familles
L’allocation de rentrée scolaire ne se limite pas à un coup de pouce ponctuel : elle structure la façon dont les foyers organisent leurs achats. En 2025 les dépenses de rentrée s’élevaient en moyenne à 236 € pour un enfant en primaire, 324 € pour un collégien et 398 € pour un lycéen. Ces montants absorbent presque en totalité l’ARS dès la rentrée, sans même aborder les frais courants de l’année.
Dans ce contexte, les baisses récentes des prix des fournitures, évaluées à –3,4 % en grandes surfaces et –6,2 % dans les magasins spécialisés en juillet (Nielsen IQ / AIPB, cité par HuffPost), représentent un répit relatif. Mais elles ne changent pas l’équilibre : les familles utilisent l’aide pour des achats indispensables et immédiats. À chaque rentrée, une dépense reste une dépense, et l’ARS n’efface pas les arbitrages budgétaires mais elle en atténue le poids.
