Faut-il s’inquiéter de l’éclatement de la bulle immobilière chinoise ?

Depuis 2 ans, la Chine subit les conséquences d’une bulle immobilière qui a éclaté. En général, ce type de situation reste circonscrit au pays concerné. Mais la Chine n’est pas un pays comme les autres : son importance dans l’économie mondiale est majeure et sa bulle immobilière est sans précédent. Ces deux éléments entraîneront des conséquences au-delà de l’économie chinoise, les entreprises européennes seront touchées, ce qui a des implications dans les choix des épargnants.

Collaborateur Bdl, Le 25 Novembre 2019 Au Siège 20 Rue Du Rocher à Paris
Par Laurent Chaudeurge Publié le 1 septembre 2023 à 7h00
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20%la Chine pèse près de 20% du PIB mondial.

Depuis 2001 et son adhésion à l’OMC, la Chine a connu une croissance remarquable de 7.8% par an pendant 20 ans. Le PIB chinois a donc doublé tous les dix ans. Le pays est devenu incontournable dans le paysage économique. C’est la deuxième économie mondiale, le premier exportateur mondial, le deuxième importateur et la deuxième destination pour les investissements directs étrangers. Industriellement, la Chine est à la première place dans de nombreux domaines comme la production de textile, de produits électroniques, de véhicules automobiles, de métaux comme l’acier, l’aluminium ou le cuivre, de panneaux solaires, etc. Aujourd’hui, la Chine pèse près de 20% du PIB mondial.

Cette croissance s’est appuyée sur une bulle immobilière dont l’ampleur ressemble à celle du Japon de la fin des années 80. Entre 2001 et 2021, les ventes de logements en m2 ont été multipliées par 8 alors que le nombre de foyers chinois n’a augmenté que de 14%1. En 2020, la valeur de l’immobilier résidentiel chinois représentait 30% du marché mondial contre une contribution de 18% au PIB mondial2. Dans les villes principales, le ratio du prix de l’immobilier sur le revenu disponible a atteint 19x en 2020 contre 11x pour le Japon au pic de la bulle immobilière3. C’est l’endettement qui a facilité cette croissance exponentielle. La dette des ménages a été multipliée par 6 en 15 ans pour atteindre 60% du PIB, proche des 70% observés au Japon en 1990.

Ces excès sont en train d’être digérés : les mises en chantiers et les ventes de logements sont actuellement en baisse de 50% ou plus par rapport au pic, effaçant 8 à 10 ans de croissance en deux ans1. Les prix sont en baisse un peu partout, parfois de plus de 20% dans des villes de second rang. Là où l’immobilier apportait 3 points de croissance par an au PIB chinois au début des années 2010, sa contribution est désormais négative3. Même si ce n’est pas le scénario principal, le risque d’une contagion et d’une crise bancaire n’est pas négligeable. Les banques chinoises détiennent 75% des créances des promoteurs immobiliers dont l’endettement a été multiplié par 4 en 10 ans. Evergrande, qui a fait faillite en 2021, en est l’exemple le plus frappant avec 300 milliards de dollars de dette. Mais d’autres acteurs ont aussi fait défaut et début août, County Garden, qui a été à un moment le plus grand promoteur chinois, n’a pas pu honorer deux paiements de coupons.

De manière anecdotique, le PIB japonais représentait 17% du PIB mondial au pic de la bulle immobilière en 1990. Dix ans plus tard ce n’était plus que 11% et seulement 6% aujourd’hui. La Chine a des atouts que le Japon n’avait pas à l’époque pour limiter les conséquences de sa propre spéculation immobilière. Les autorités ont réagi plus tôt, les taux réels sont inférieurs à la croissance réelle et le taux de change est resté stable alors que celui de japon s’était apprécié de 145%, posant de graves problèmes de compétitivité aux multinationales japonaises.

Mais il ne faut pas se tromper. La Chine est durablement affectée et l’économie mondiale avec. Sur les 20 dernières années, la croissance chinoise a été responsable de 1/3 de la croissance mondiale. En Europe, pour certaines multinationales, c’est leur plus gros moteur de croissance qui est touché. On pense évidemment aux valeurs de consommation ou à de grandes entreprises industrielles. Pour mesurer l’importance de la Chine pour certains groupes, prenons l’exemple de l’industrie du luxe. Là où le consommateur chinois était inexistant il y a 20 ans, il représente aujourd’hui près de 30% des dépenses mondiales dans le luxe.

L’épargnant doit prendre cette nouvelle donne en compte et protéger son capital en étant plus exigeant sur la valorisation de ces sociétés qui auront moins de croissance.

1 Source BNPParibas Exane

https://www.savills.com/impacts/market-trends/the-total-value-of-global-real-estate.html

3 Source Goldman Sachs

4 Morgan Stanley

Collaborateur Bdl, Le 25 Novembre 2019 Au Siège 20 Rue Du Rocher à Paris

Responsable de l’ESG, Porte-parole de la Gestion

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