L’EFS a confirmé, le 22 août, que les mentions relatives aux relations homosexuelles seraient supprimées de ses archives, mettant fin à une pratique héritée de l’époque où le don du sang excluait certains publics.
Don du sang : l’EFS supprime les données liées aux relations homosexuelles

Du changement dans la gestion des données du don du sang
L’annonce de l’EFS marque l’aboutissement d’un long processus de révision des critères appliqués aux donneurs. L’institution reconnaît que, jusqu’en 2022, les entretiens préalables au don comportaient systématiquement une question sur les relations homosexuelles. « Jusqu’en 2022, nous avons été conduits à collecter, lors des entretiens préalables au don, des données sur ce qui était une contre-indication réglementaire au don de sang, avec la mention HSH », a expliqué Sara-Lou Gerber, directrice générale déléguée de l’EFS, dans Fréquence Médicale. Ces données, sensibles par nature, étaient conservées dans ce que la responsable a décrit comme une « sorte de capsule à part du système d’information, accessible à un nombre très limité de salariés, et cryptée ».
Ce dispositif de stockage avait pour but de répondre à la réglementation, mais il soulevait de nombreuses critiques. Au printemps 2025, un ancien donneur ayant eu des relations homosexuelles a demandé l’effacement de son dossier. Cette requête a enclenché un processus interne de réflexion et conduit l’EFS à consulter le ministère de la Santé ainsi que l’Agence nationale de sécurité du médicament. Leur feu vert a permis d’engager l’opération de suppression. Selon Sara-Lou Gerber, « d’ici mi ou fin septembre, le plus gros des données devrait avoir été supprimé, avant des nettoyages complémentaires d’ici la fin de l’année maximum ».
Le principe d’égalité dans le don du sang
Pour comprendre la portée de cette annonce, il faut revenir sur l’histoire des critères appliqués au don du sang. Après l’apparition du VIH dans les années 1980, la France avait choisi, en 1983, d’interdire totalement le don pour les hommes ayant des relations homosexuelles. Cette exclusion a duré plus de trente ans, avant qu’un assouplissement progressif ne soit mis en place. En 2016, ces donneurs ont été autorisés à contribuer, à condition de respecter un an d’abstinence. Trois ans plus tard, en 2019, ce délai a été réduit à quatre mois. Enfin, en mars 2022, la règle a totalement disparu, permettant à chacun de donner son sang « sans conditions », comme l’a rappelé l’EFS.
Ces évolutions répondaient à deux impératifs : garantir la sécurité transfusionnelle et mettre fin à une discrimination jugée injustifiable au regard des connaissances scientifiques. Depuis 2022, l’entretien préalable au don ne comporte plus aucune mention liée à l’orientation sexuelle. Pourtant, les archives gardaient trace de données collectées pendant plusieurs décennies. Pour de nombreuses associations, cette situation représentait une anomalie et une violation du droit à la vie privée. La Cour européenne des droits de l’homme avait d’ailleurs condamné la France en septembre 2022 pour conservation injustifiée de données sensibles non conformes au règlement général sur la protection des données.
La pression associative
La décision récente n’est pas seulement le fruit d’un débat interne à l’EFS. Elle a été accélérée par la mobilisation d’associations LGBT+. Le collectif TOUS.TES, très actif sur la question, avait lancé une pétition qui a recueilli environ 16 000 signatures. Pour ses responsables, l’effacement annoncé constitue « une victoire pour le droit à la vie privée ». L’association a insisté sur le fait que la conservation de telles données était inutile depuis l’ouverture totale du don du sang en 2022. Cette mobilisation fait écho à un contexte plus large, celui d’une société qui exige transparence et respect de la vie privée dans le traitement des données de santé. Les revendications des associations ont été relayées par plusieurs médias nationaux et régionaux, contribuant à maintenir la question dans le débat public.
Le rôle de certains donneurs a également été déterminant. La requête individuelle déposée par un ancien donneur homosexuel, au printemps 2025, a servi de déclencheur. Elle illustre la façon dont une démarche individuelle peut catalyser une réforme d’ampleur nationale, dans un domaine aussi sensible que la transfusion sanguine. L’effacement des données archivées représente ainsi un signal fort. Celui d’une santé publique désormais centrée sur les pratiques à risque réelles et non sur l’orientation sexuelle des citoyens. Alors que le don du sang reste vital pour assurer les besoins hospitaliers, l’égalité d’accès est désormais garantie à tous les volontaires, quelle que soit leur histoire personnelle.
