Un projet de loi immigration de Bruno Retailleau voulait multiplier par deux la durée maximale de rétention pour certains étrangers condamnés. Les Sages ont tranché : pas question.
Rétention prolongée des étrangers dans la loi immigration : le Conseil constitutionnel dit « non »

Passer de trois à sept mois derrière les murs d’un centre de rétention administrative, c’était l’idée du gouvernement. Mais le Conseil constitutionnel a mis un coup d’arrêt net.
Une réforme qui voulait frapper fort
La loi immigration, portée par la sénatrice Les Républicains Jacqueline Eustache-Brinio et défendue par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, visait à prolonger la rétention administrative de 90 à 210 jours. Objectif affiché : mieux gérer les étrangers condamnés pour des faits graves ou considérés comme une menace d’une « particulière gravité » à l’ordre public. Aujourd’hui, cette durée de 210 jours ne s’applique qu’aux affaires de terrorisme.
Dans sa décision du 7 août 2025, le Conseil a rappelé que « la liberté individuelle ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit pas nécessaire ». Problème : la loi prévoyait cette prolongation « y compris pour des infractions qui ne sont pas d’une particulière gravité » et sans prouver qu’un étranger, après avoir purgé sa peine, représente encore une menace actuelle. Verdict des Sages : ce n’est « pas proportionné à l’objectif de lutte contre l’immigration irrégulière poursuivi ».
Loi immigration : un débat qui dure depuis des années
Les associations de défense des droits des étrangers, comme la Cimade, parlent d’un « camouflet » pour Bruno Retailleau. Fanélie Carrey-Conte, sa secrétaire générale, salue « un coup d’arrêt porté à une dérive sécuritaire, de surcroît inefficace et maltraitante ». Du côté du Rassemblement national, le ton est tout autre. Le député Matthias Renault dénonce « une décision irresponsable, violant la souveraineté du Parlement et en dehors des standards européens ».
En France, la durée légale de rétention administrative a beaucoup changé. De 10 jours en 1993, elle est passée à 45 jours en 2003, puis à 90 jours avec la loi Collomb de 2018. En 2024, selon les associations intervenant dans ces centres, un retenu passait en moyenne 33 jours en CRA. L’année dernière, 40 592 personnes ont été placées en rétention, contre 46 955 en 2023.