Logement : toujours plus de SDF dans la rue malgré les promesses

Alors que les températures hivernales frappent durement, la crise du logement en France atteint des niveaux inédits.

Jade Blachier
Par Jade Blachier Publié le 4 février 2025 à 12h02
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735 personnesEn 2024, 735 personnes ont perdu la vie dans la rue.

Le 5 février 2024, la Fondation pour le logement des défavorisés (anciennement Fondation Abbé Pierre) a publié son 30ᵉ rapport annuel sur l’état du mal-logement en France. Ce document met en lumière une crise qui s'intensifie : le nombre de sans-domicile fixe (SDF) a atteint 350 000 personnes, un chiffre en augmentation constante depuis une décennie.

Un nombre record de sans-domicile fixe : un fléau qui s’intensifie

Les données compilées par Statista et la Fondation pour le logement des défavorisés révèlent une augmentation impressionnante du nombre de sans-abri en France ces dernières années. En 2012, environ 143 000 personnes étaient recensées comme sans domicile fixe. En 2023, ce chiffre est monté à 330 000, marquant une hausse de 130 % en une décennie. En seulement une année supplémentaire, en 2024, la progression s’est poursuivie, atteignant 350 000 personnes, soit une augmentation de 6 % par rapport à l’année précédente.

Ce phénomène ne se limite pas aux sans-abri visibles dans les rues. Il inclut également ceux vivant dans des habitations de fortune, en hébergement collectif, à l’hôtel ou dans des structures d’accueil pour demandeurs d’asile. Le nombre de décès parmi les sans-abri a également atteint un niveau alarmant. En 2024, 735 personnes ont perdu la vie dans la rue. L’espérance de vie moyenne d’un SDF en France est de 49 ans, illustrant l’extrême précarité de ces populations.

Expulsions, précarité et mal-logement : l’État à la dérive ?

La situation des locataires précaires s’aggrave considérablement. En 2023, plus de 19 000 ménages ont été expulsés de leur logement par les forces de l’ordre, un chiffre en augmentation de 17 % en un an et de 150 % sur les vingt dernières années. En raison de la crainte d’une expulsion, près de 80 000 personnes ont préféré quitter leur logement d’elles-mêmes avant d’y être contraintes par la justice.

La répression des occupations illégales a également atteint un record. Plus de 100 000 évacuations forcées ont eu lieu dans des squats, bidonvilles et campements en 2023. Ces chiffres sont directement liés à l’application de la loi Kasbarian-Bergé, adoptée en juillet 2023. Ce texte législatif a durci les règles en matière de délais de paiement pour les locataires en difficulté, réduit les possibilités de recours et instauré des sanctions plus sévères contre les occupants sans titre. Toute personne refusant de quitter un logement à l’issue d’une procédure d’expulsion s’expose désormais à une amende de 7 500 euros.

Les associations dénoncent une politique punitive, qui ne prend pas en compte la réalité sociale de la crise du logement. Christophe Robert, secrétaire général de la Fondation pour le logement des défavorisés, décrit cette situation comme un "renoncement total des pouvoirs publics". En 2017, Emmanuel Macron avait promis une baisse significative des sans-abri d'ici la fin de l'année.

Le logement social en panne : un secteur à bout de souffle

L’une des causes majeures de cette crise est la pénurie de logements sociaux en France. Actuellement, 2,7 millions de ménages sont en attente d’un logement social, soit un million de plus qu’il y a dix ans. La construction de logements sociaux n’a jamais été aussi basse.

En 2016, près de 124 000 logements sociaux avaient été construits. En 2023, ce chiffre est tombé à 82 000, et les prévisions pour 2024 sont encore plus pessimistes, avec seulement 72 000 logements sociaux prévus. Cette baisse s’explique par des décisions budgétaires gouvernementales qui ont fragilisé le secteur du logement social. La hausse de la TVA appliquée aux constructions HLM et la réduction du loyer solidarité (RLS) ont considérablement diminué les capacités financières des organismes de logement social. Faute de moyens, ceux-ci doivent désormais choisir entre la réhabilitation des logements existants et la construction de nouvelles unités.

Un hiver meurtrier pour les sans-abri : quelles solutions ?

L’hiver 2024 a été particulièrement rude pour les sans-abri, avec des températures négatives rendant leurs conditions de vie encore plus précaires. Bien que des places d’hébergement d’urgence aient été ouvertes, elles restent largement insuffisantes. Chaque soir, entre 5 000 et 8 000 personnes sont refoulées du 115, faute de places disponibles.

Face à cette crise, les associations réclament un moratoire sur les expulsions locatives, afin d’éviter que des milliers de personnes ne se retrouvent à la rue du jour au lendemain. Elles demandent également un plan de relance ambitieux pour la construction de logements sociaux, seule solution permettant de répondre à la demande croissante. Elles appellent à une augmentation significative des moyens alloués à l’hébergement d’urgence, afin de garantir un toit à ceux qui en ont le plus besoin.

Le silence du gouvernement sur ces questions inquiète de plus en plus les acteurs de terrain. Malgré les rapports alarmants et les interpellations répétées, aucune annonce majeure n’a été faite pour améliorer la situation des plus précaires.

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Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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