Emmanuel Macron a donc dévoilé - tardivement - son plan d’aide à la culture, et ce faisant, il semble avoir enfoncé le dernier clou de son cercueil politique.
Bras de chemise, cheveux défaits et cravate dénouée, que ce numéro d’acteur malaisant ne nous y trompe pas : encore une fois, c’est le flou le plus total, l’hésitation chaotique conjuguée à un amateurisme flamboyant. Monopolisant la parole, reléguant son ministre de la Culture à un rôle de figurant (« Tais-toi, c’est moi qui parle ! »), le Président donnait presque l’impression d’improviser à certains moments, tant les contours de son plan sont encore trop dans l’abstrait.
Une seule proposition concrète en sera ressortie : les droits des intermittents prolongés jusqu’en août 2021. On pourrait presque applaudir et pousser un soupir de soulagement, mais ne nous laissons pas berner par les beaux yeux d’Emmanuel. Cette mesure concerne ceux qui ont déjà une ouverture de droits, les artistes bien installés qui n’ont aucun mal à enchaîner leurs 507 heures, les Sandrine Kiberlain, les Eric Toledano qui, comme par hasard étaient attablés autour du Président lors de son annonce.
Sans être aussi amer, il est vrai que d’autres artistes, de parfaits anonymes, méritants, et ils sont nombreux, bénéficient eux aussi de l’assurance chômage du régime intermittent et ont accueilli la nouvelle avec soulagement.
Mais qu’en est-il de ces artistes encore plus nombreux qui n’ont pas encore accès à ce dispositif car ils peinent trop souvent à cumuler leurs 44 cachets ? Que faire de ces femmes et hommes qui vivent du RSA, d’un job de serveur.se payé au noir et de temps en temps d’un maigre cachet ?
Quelles mesures pour ces centaines de petites salles privées présentes dans toute la France d’une capacité de 100 à 200 places ou même moins qui œuvrent (non, œuvraient, on a du mal à s’y faire) toute l’année à proposer une programmation de qualité et qui ont aidé à révéler des Blanche Gardin, des Elodie Poux, des Haroun, des Bun Hay Mean ? Aujourd’hui, ces salles sont exsangues et ne (sur)vivent que grâce à la générosité de leur public fidèle via une cagnotte en ligne. Si ces lieux sont amenés à disparaître, ce sont des centaines d’artistes qui seront amputés de leur lieu de travail.
On a peu entendu le ministre de la Culture, et ce n’est peut-être pas plus mal, car quelques jours plus tôt il préconisait le maintien de certains petits festivals cet été en respectant les mesures sanitaires, c’est-à-dire avec un masque obligatoire, une distance d’un mètre entre chaque spectateur et moins de 50 personnes. C’est à se demander si monsieur Riester a déjà mis les pieds dans un festival. Quelqu’un pourrait lui dire qu’un festival de moins de 50 personnes, ça ne s’appelle pas un festival, mais un échec ?
Comment combler le manque à gagner si l’on joue devant une moitié ou un quart de salle ? Le gouvernement s’est-il engagé à prendre en charge cette perte financière ? Non, il préfère rester silencieux sur ces problèmes concrets.
Dans le milieu de la culture, nous étions habitués à être les derniers de cordée, mais on l’était moins à être aussi humiliés.