La responsabilité du quatrième pouvoir dans les crises sanitaires

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Par Christian Harbulot Modifié le 9 juillet 2012 à 3h26

Les crises qui secouent le monde de la santé depuis le milieu des années 80 ont mis à jour certains dysfonctionnements du processus de contrôle sanitaire, les mauvaises décisions de certains politiques et les fautes commises par les laboratoires. Une étude réalisée en juin 2012 par des étudiants de l’Ecole de guerre économique souligne le rôle très ambigu des médias dans la manière d’aborder ce type de situation. L’analyse des trois grandes crises sanitaires (sang contaminé, farines animales et médiator) a fait ressortir les failles du système médiatique et leurs répercussions sur le jeu des acteurs.

L’affaire du sang contaminé est le point de départ d’une confusion entre la manière d’informer sur une crise sanitaire et la tentation de tirer profit d’une crise qui devient médiatique. Les médias ont abordé cette crise en trois étapes : investigation des journalistes scientifiques, suivi des affaires juridiques, dénonciation d’un scandale d’Etat. L’analyse détaillée de la couverture médiatique met en évidence l’importance que les médias ont donnée à la résonance juridique et politique de l’affaire et non au traitement vital de la dimension sanitaire de la crise. Citons la division apparue au sein du corps médical sur la fiabilité des premiers tests de détection et sur la pertinence de leur généralisation. Dans le même ordre d’idées il est reproché à l’Etat d’avoir trop attendu pour imposer l’utilisation du plasma chauffé par rapport aux Etats-Unis. Mais il n’est pas ou peu fait référence aux conséquences de la pression exercée sur les pouvoirs publics par les milieux hémophiles afin d’obtenir coûte que coûte du sang transfusé.

Le traitement de la couverture médiatique fait ressortir des constantes que l’on relève aussi dans l’affaire des farines animales et celle plus récente du Médiator. La grande majorité des médias dénonce la mauvaise gestion des risques sanitaires par l’Etat. A contrario, les médias sont silencieux sur les failles récurrentes du quatrième pouvoir (recherche du scoop et du titre à sensation, recherche d’une hausse des ventes, personnalisation du problème de la part de certains journalistes). Notons à ce propos que dans l’affaire du Médiator, le Tribunal de Nanterre a dénoncé en mai dernier l'utilisation des médias par les avocats des parties civiles pour forcer la décision de la justice. Le glissement de la crise sanitaire vers la crise médiatique a obligé le politique à créer le bouclier du principe de précaution qui est d’abord une arme de communication avant d’être la traduction d’une pertinence scientifique.

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Christian Harbulot est directeur de l'École de Guerre Économique et directeur associé du cabinet de conseil Spin Partners, spécialisé en intelligence économique et lobbying.

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