L’annonce de Ryanair bouleverse tout l’écosystème du transport aérien français. En raison d’une fiscalité jugée insoutenable, la compagnie s’apprête à abandonner plusieurs aéroports régionaux dès l’été 2026. Un retrait qui pose de sérieuses questions sur l’avenir économique et touristique des territoires, alors que les taxes sur les billets atteignent des niveaux inédits.
Ryanair quitte ces régions françaises en 2026 à cause des taxes

Depuis le 9 novembre 2025, Ryanair alerte publiquement sur son intention de réduire fortement sa présence dans les aéroports régionaux français, invoquant un alourdissement continu de la fiscalité sur les billets d’avion. La hausse spectaculaire des taxes menace les liaisons de nombreuses régions et pèse sur l’équilibre économique du secteur aérien.
Ryanair quitte les régions : un choc pour les territoires français
Ryanair justifie son départ de plusieurs aéroports régionaux par un environnement fiscal devenu intenable pour un modèle low cost. Selon Jason McGuinness, directeur commercial, « Nous quitterons plusieurs aéroports régionaux français cet été. Quand vous augmentez les impôts de 180%, cela rend ces aéroports non viables pour nous », a-t-il déclaré dans un entretien pour Challenges. Cette hausse massive des taxes touche directement les billets, car la TSBA, principale charge supplémentaire, a été triplée depuis mars 2025. De ce fait, Ryanair estime ne plus pouvoir absorber ce choc, qui frappe davantage les compagnies à bas coûts les plus dépendantes de volumes élevés et de marges réduites.
L’enjeu dépasse la seule compagnie. La DGAC rappelle que la hausse de cette taxe influence « les prix, les coûts et la dynamique du trafic aérien ». Les données publiées début novembre confirment une réalité préoccupante : la fiscalité augmente le prix des billets, diminue l’attractivité des aéroports régionaux et dégrade la compétitivité française face aux autres pays européens. En parallèle, l’alourdissement des charges ralentit la croissance de l’offre de sièges, limitée à 1,5 % au deuxième trimestre 2025 au départ de la France, contre 4,5 % en moyenne en Europe. Cette asymétrie fragilise les régions déjà sous-desservies.
Une fiscalité devenue un handicap structurel pour l’aérien français
La colonne vertébrale du problème reste fiscale. Depuis son triplement, la TSBA atteint en moyenne 7,40 euros par billet en classe économique intra-UE, contre 2,60 euros auparavant. Selon la DGAC, l’effet prix atteint un surcoût direct de 4,77 euros en éco européenne et peut grimper jusqu’à 120 euros sur un billet long-courrier en classe affaires. Ces montants pèsent lourdement sur les compagnies, mais encore plus sur les acteurs low cost, dont la promesse tarifaire repose sur des billets accessibles. Par conséquent, Ryanair explique que la France n’est plus compétitive par rapport à d’autres pays européens où la fiscalité reste stable ou modérée.
La situation est similaire pour l’aviation d’affaires, un secteur pourtant stratégique. L’EBAA France évoque un dispositif qui « détruit le pavillon français », pointant des hausses pouvant aller jusqu’à 2000 euros par passager. Dans le détail, les taxes augmentent de 112 % pour les voyages long-courriers éco et de 67 % pour les billets affaires long-courrier. Pour le secteur low-cost comme pour l’aviation d’affaires, la conclusion est identique : la fiscalité française crée un désavantage compétitif dont les répercussions risquent d’être profondes.
Des conséquences directes sur l’emploi, le tourisme et l’aménagement du territoire
Le retrait de Ryanair affectera d’abord l’emploi dans les régions, car la fermeture de bases et la réduction d’activité entraînent mécaniquement moins de rotations, moins d’équipes locales et moins de prestataires. Par ailleurs, les aéroports dépendants du low -cost subiront une baisse de fréquentation dont ils auront du mal à se relever. De nombreux gestionnaires régionaux craignent déjà une chute du trafic touristique, essentielle pour les hôtels, restaurants et activités de loisirs. Pour le tourisme international, la situation est particulièrement préoccupante : sans Ryanair, l’accès à certaines villes françaises deviendra plus complexe et plus coûteux.
Au-delà du tourisme, c’est toute la capacité des régions à se connecter au monde qui s’affaiblit. Une liste limitée d’aéroports reste viable pour les compagnies low-cost. Si Ryanair se retire des hubs secondaires, certaines villes se retrouveront isolées du trafic européen direct. Cela réduit la mobilité des habitants et limite la possibilité pour les entreprises d’implanter leur siège hors de Paris. Une métropole sans aéroport international ou sans connexions régulières perd en attractivité économique et en capacité à accueillir des investisseurs étrangers.
Un recentrage du pays vers Paris et une fracture territoriale aggravée
En quittant les aéroports régionaux, Ryanair accentue un phénomène déjà documenté : la recentralisation du trafic aérien vers Paris. Les autres pays européens misent sur la décentralisation aéroportuaire pour dynamiser leurs territoires, alors que la France semble glisser vers l’effet inverse à mesure que les coûts explosent. Benjamin Smith, directeur général d’Air France-KLM, résume l’enjeu en affirmant que « ce ne sont pas seulement les compagnies aériennes qui en pâtissent, c’est tout le secteur du voyage, du tourisme, de l’hôtellerie ». Ainsi, la hausse des taxes ne se limite pas aux billetteries. Elle retombe sur toute une chaîne d’acteurs régionaux dépendants de la connectivité aérienne.
Cette perspective nourrit une inquiétude grandissante chez les élus locaux. En effet, lorsqu’une région perd une liaison aérienne, c’est toute son intégration économique qui s’affaiblit. Par conséquent, la réduction de l’activité Ryanair pourrait creuser davantage l’écart entre les métropoles bien reliées et les zones périphériques déjà fragiles. Sans diversification des compagnies sur les plateformes secondaires, ces aéroports pourraient se retrouver avec une activité minimale, difficilement compatible avec leur équilibre financier. Le débat sur la fiscalité aérienne devient alors un débat sur l’aménagement du territoire.
