La réforme du bonus écologique pour l’achat d’une voiture électrique entre en vigueur dès juillet 2025. À la clé, un soutien accru pour les ménages modestes. Mais attention : derrière l’annonce généreuse, c’est un glissement discret du financement vers les fournisseurs d’énergie – et donc, potentiellement, vers vos factures. Explications.
Voiture électrique : l’État gonfle les aides… et vous apporte l’addition

Le 5 juin 2025, le gouvernement français a confirmé une refonte majeure de l’aide à l’achat de voitures électriques. Officiellement, il s’agit de renforcer le pouvoir d’achat des ménages modestes et de soutenir l’électrification du parc automobile. Dans les faits, la mesure repose sur un mécanisme peu transparent : pour la première fois, le bonus écologique sera en partie financé non par le budget de l’État, mais par les certificats d’économies d’énergie (CEE). Et derrière cette subtilité technocratique se cache un transfert de charge potentiellement explosif.
Le nouveau bonus : jusqu’à 7 000 euros pour une voiture électrique, mais pas pour tout le monde
Le gouvernement l’assure : les Français les plus modestes bénéficieront d’un bonus écologique revalorisé. Le montant pourra atteindre 7 000 euros pour l’achat d’un véhicule électrique neuf, contre un plafond actuel de 5 000 euros. Cette somme comprendra :
- Un bonus principal de 4 000 euros ;
- Une surprime territoriale allant jusqu’à 1 000 euros pour les zones à faibles émissions ;
- Une aide complémentaire financée par les CEE, oscillant entre 1 000 et 2 000 euros.
Mais ce geste se veut ciblé. Ne seront éligibles que les foyers dont le revenu fiscal de référence par part est inférieur à 14 090 euros. Les autres continueront à bénéficier du barème classique, au mieux. Le quotidien Les Échos confirme que cette mesure « entre en application à partir de juillet 2025 », et qu’elle vise à renforcer l’attractivité de l’électrique dans un contexte d’inflation énergétique croissante.
Les CEE à la rescousse… ou à la manœuvre ?
Derrière la stratégie du gouvernement il y a les CEE. Les certificats d’économies d’énergie, peu connus du grand public, sont une obligation imposée aux fournisseurs d’énergie (électricité, gaz, carburants) de financer des actions de sobriété énergétique. Concrètement ? S’ils ne prouvent pas qu’ils ont permis des économies, ils doivent verser des pénalités à l’État.
Jusqu’ici utilisés pour la rénovation thermique ou le remplacement de chaudières, ces CEE vont désormais couvrir une partie des aides à l’achat de voitures électriques. Une bascule inédite, présentée comme « innovante » par le ministère de la Transition écologique. Mais qui pourrait coûter finalement plusieurs centaines d'euros de plus chaque années aux ménages. Les énergéticiens, contraints de financer les aides, pourraient tout simplement répercuter le coût sur les consommateurs, comme ils l’ont déjà fait par le passé pour d’autres obligations environnementales. En somme, l’aide publique devient une aide privée… à vos frais.
Professionnels dubitatifs, flou réglementaire
La méthode choisie irrite déjà les professionnels. Les fournisseurs d'énergie, évidemment, aux premières lignes. Mais aussi les concessionnaires, chez qui l’incertitude règne : qui versera quoi ? Dans quels délais ? Et avec quels documents justificatifs ? Xavier Horent, président de Mobilians, s’est dit inquiet dans Auto Infos : « Il est incompréhensible que l’État décide unilatéralement d’alourdir la charge des énergéticiens pour financer des aides automobiles, sans concertation. »
La réforme arrive à grande vitesse : elle entrera en vigueur dès juillet, avec une publication des décrets attendue fin juin. Une temporalité jugée irréaliste par les fédérations professionnelles, d’autant qu’aucune simulation n’a encore été rendue publique pour évaluer les effets réels du dispositif.
Un pari risqué sur fond de transition vers la voiture électrique
À première vue, cette réforme aligne plusieurs objectifs : verdir la flotte automobile, soutenir le pouvoir d’achat, contenir les dépenses publiques. Mais la manœuvre révèle un glissement progressif de la responsabilité de l’État vers les entreprises privées — et indirectement, vers les citoyens.
Sur son site officiel, le ministère de l’Écologie reste laconique : « Le bonus écologique sera renforcé à partir de juillet 2025. Son financement combinera enveloppe budgétaire et soutien par les CEE. » Autrement dit : l’État en fait moins, les énergéticiens en font plus, et personne ne sait vraiment qui va en sortir gagnant.
