Sébastien Lecornu démissionne, la sortie de crise n’est pas pour demain

La démission de Sébastien Lecornu, annoncée lundi 6 octobre 2025, plonge une nouvelle fois l’exécutif français dans l’incertitude. À peine un mois après sa nomination, le Premier ministre quitte Matignon, laissant derrière lui un budget 2026 inachevé et un climat politique instable qui pourrait peser lourd sur l’économie française et la confiance des marchés.

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By Adélaïde Motte Published on 6 octobre 2025 11h10
Sebastien Lecornu Demissionne La Sortie De Crise Nest Pas Pour Demain
Sébastien Lecornu démissionne, la sortie de crise n’est pas pour demain - © Economie Matin

Instabilité politique et incertitude économique

En remettant sa démission à Emmanuel Macron, Sébastien Lecornu met fin à un mandat éclair de vingt-sept jours, le plus court de la Ve République. L’Élysée a confirmé l’information dans un communiqué laconique, évoquant « la démission du Premier ministre, acceptée par le président de la République ». Cette démission, si rapide, n’est pas sans conséquences pour l’économie nationale : elle intervient à la veille des discussions parlementaires sur le budget 2026, déjà tendues et reportées à plusieurs reprises.

Les investisseurs, eux, observent avec inquiétude cette valse gouvernementale. À Paris, le CAC 40 a ouvert en légère baisse lundi matin, juste avant la démission de Sébastien Lecornu, cédant 0,4 %, dans un contexte d’incertitude politique grandissante. Plusieurs analystes estiment que l’instabilité institutionnelle pèse sur la crédibilité budgétaire de la France. « L’absence de cap politique clair à un moment où le pays affronte un ralentissement économique risque de peser sur la confiance », indique un économiste cité par Franceinfo.

Un budget 2026 en suspens et des réformes à l’arrêt

Le départ de Sébastien Lecornu gèle de facto les discussions autour du budget 2026, que le gouvernement devait présenter en Conseil des ministres cette semaine. Le texte devait comporter plusieurs mesures phares : une baisse des impôts sur le revenu pour les couples modestes, une revalorisation des salaires publics, ainsi qu’un effort annoncé pour le pouvoir d’achat via la stabilisation des prix de l’énergie. Autant de chantiers désormais en suspens.

Le ministère de l’Économie, dirigé par Bruno Le Maire, doit assurer la continuité. Mais plusieurs arbitrages budgétaires n’avaient pas encore été tranchés, notamment sur les économies à réaliser pour tenir la trajectoire des 3 % de déficit public exigée par Bruxelles. En pleine négociation avec la Commission européenne, cette démission pourrait compliquer le calendrier et fragiliser la position française au sein de l’Union.

La confiance des marchés en question

Depuis la crise politique ouverte début septembre, la France fait face à une hausse mesurée mais continue de ses taux d’emprunt à dix ans, qui flirtent désormais avec les 3,4 %, contre 2,9 % en début d’année. Une situation encore soutenable, mais qui témoigne d’une nervosité latente des investisseurs internationaux.

« Les marchés détestent l’imprévisibilité, et la France en fournit à chaque remaniement », alerte un stratégiste financier interrogé par Les Échos. Le départ de Sébastien Lecornu retarde la présentation du plan d’investissement industriel et de la réforme de l’assurance chômage, deux piliers censés soutenir la compétitivité et l’emploi. Sans vision gouvernementale stable, ces réformes risquent de s’enliser, alors même que la croissance pour 2025 est déjà révisée à 0,8 %.

Un coût politique et symbolique pour Emmanuel Macron

Pour Emmanuel Macron, cette démission sonne comme un échec personnel. Après Élisabeth Borne, Gabriel Attal, Michel Barnier et François Bayrou, Sébastien Lecornu devait incarner une forme de réconciliation entre technocratie et ancrage territorial. Mais l’absence de majorité stable, l’échec du dialogue avec Les Républicains et les divisions internes ont eu raison de son gouvernement avant même sa mise en route.

Sur le plan économique, le président devra désormais rassurer partenaires et acteurs privés en désignant un successeur à Sébastien Lecornu. La France, qui traîne une dette de 3 500 milliards d'euros en augmentation, ne peut se permettre une perte supplémentaire de crédibilité. Un proche de Bercy confiait lundi matin à France Bleu : « Chaque crise politique repousse la mise en œuvre des réformes structurelles. Cela finit par coûter cher, non seulement en points de croissance, mais aussi en image. »

À défaut de stabilité, la présidence Macron s’enfonce, encore plus qu'il n'y était déjà, dans une ère d’instabilité chronique, où chaque remaniement perturbe la prévisibilité économique. Et pendant que le pays attend un nouveau Premier ministre après Sébastien Lecornu, le budget, lui, attend toujours un pilote, et les Français attendent des ministres qui pourront prendre à bras le corps les trop nombreux chantiers du pays.

Ade Costume Droit

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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