Budget 2025 : des hypothèses économiques trop optimistes
Le gouvernement Bayrou annonce une réduction des dépenses publiques de 32 milliards d’euros pour son budget 2025, un chiffre impressionnant qui, en apparence, traduit un virage budgétaire sérieux. Pourtant, Charles de Courson nuance cette présentation. Il affirme que l’essentiel de ces économies n’en sont pas réellement :
- Hausse des prélèvements déguisée en baisse des dépenses : la diminution des allègements de charges sociales sur les salaires est comptabilisée comme une baisse de dépenses, alors qu’il s’agit en réalité d’une hausse des prélèvements obligatoires.
- Comparaison biaisée : le gouvernement compare ses chiffres à une trajectoire tendancielle des dépenses publiques, et non au budget 2024. Résultat ? L’effort budgétaire indiqué repose sur des hypothèses discutables.
"Le gouvernement comptabilise dans les baisses de dépenses des éléments qui sont en réalité des hausses de prélèvements, comme la baisse des allègements de charges sociales sur les salaires."
Concrètement, 60 % de l’effort repose sur des hausses de recettes et seulement 40 % sur de réelles réductions des dépenses publiques, soit exactement l’inverse de ce qu’annonce l’exécutif.
Pour Charles de Courson, le budget 2025 repose sur des prévisions macroéconomiques irréalistes. Malgré la révision de la croissance à 0,9 %, le député estime que ce chiffre reste trop élevé :
- Consensus des économistes : la plupart des experts tablent sur une croissance plus proche de 0,7 %, ce qui réduirait mécaniquement les recettes fiscales d’environ 6 milliards d’euros.
- Une inflation surestimée : le gouvernement fonde ses projections sur une hausse des prix plus forte qu’attendue, ce qui fausse l’évaluation des rentrées fiscales.
"Le consensus des économistes est aujourd’hui plus proche de 0,7 %. Il en va de même pour la prévision d’inflation, qui reste trop élevée vu l’évolution des prix. Cela représente environ 6 milliards d’euros de recettes qui risquent de ne pas se matérialiser par rapport au PLF 2024."
Si ces prévisions ne se concrétisent pas, le déficit public pourrait être bien plus élevé que prévu.
Un risque juridique majeur pour 10 milliards d’euros
Au-delà des incertitudes économiques, des fragilités juridiques pèsent sur le budget 2025. Le gouvernement prévoit deux mesures fiscales clés :
- Une surtaxe d’impôt sur les sociétés (8 milliards d’euros).
- Une contribution sur les hauts revenus (2 milliards d’euros).
"Les deux principales mesures fiscales sur lesquelles mise le gouvernement pour 2025 – la surtaxe d'impôt sur les sociétés pour 8 milliards et la contribution différentielle sur les hauts revenus pour 2 milliards – présentent une fragilité constitutionnelle, car voter ces mesures en février pose un problème de rétroactivité."
Si ces mesures venaient à être invalidées, l’État perdrait instantanément 10 milliards d’euros de recettes attendues, aggravant encore le déficit.
Charles de Courson insiste sur un point fondamental : les véritables économies nécessitent des réformes structurelles profondes, notamment sur les dépenses sociales. Or, le gouvernement évite soigneusement de s’attaquer à ces sujets sensibles.
Quelques constats accablants :
- Les dépenses sociales sont le premier poste de dépense publique et représentent l’essentiel de l’augmentation du poids de l’État dans l’économie depuis 20 ans.
- Les collectivités locales ne seront pas freinées, car aucun mécanisme de régulation ne limite réellement leur capacité de dépense.
- Les économies sur l’État restent floues, particulièrement celles annoncées par la ministre du Budget sur les opérateurs publics et les achats des ministères.
"Sur les vingt dernières années, qu'est-ce qui explique l'augmentation du poids de la dépense publique dans le PIB ? Ce n'est pas le budget de l'État, ce sont les prestations sociales. Mais réaliser des économies sur ce champ est difficile."
Sans réforme en profondeur, toute tentative de réduction du déficit risque d’être un échec.
Un budget à haut risque
Face à ces constats, Charles de Courson met en garde : tout est réuni pour que le budget 2025 dérape.
- Des hypothèses de croissance irréalistes.
- Des mesures fiscales menacées juridiquement.
- Une présentation trompeuse des économies.
"Tout est réuni pour que ce budget dérape. D'une part parce que la discussion parlementaire se fonde sur des hypothèses en décalage avec la réalité. D'autre part, nous avons 10 milliards qui risquent d'être invalidés. Le déficit sera pire qu’annoncé, alors que celui-ci est déjà inquiétant."
Avec un déficit déjà alarmant, la France pourrait bien voir son budget exploser bien au-delà des 5,4 % du PIB prévus, et ce, bien avant la fin de l’année 2025.
Le verdict tombera après le débat en commission mixte paritaire, qui débute le 30 janvier 2025, mais pour Charles de Courson, le dérapage semble inévitable.
Le député ne s'est pas prononcé pour le vote d'une motion de censure ou non si le Premier ministre François Bayrou venait, comme son prédécesseur Michel Barnier, à déclencher un 49.3.