La menace d’une taxe de 100 % sur le cinéma étranger, brandie par Donald Trump, provoque un séisme culturel et économique. Derrière cette offensive protectionniste, c’est toute l’architecture mondiale de la production et de la distribution des films qui vacille.
Cinéma en danger : Trump annonce une taxe de 100 %

Le 29 septembre 2025, Donald Trump a déclaré vouloir imposer une taxe douanière de 100 % sur tous les films produits hors des États-Unis. Selon Reuters, cette mesure s’inscrit dans l’élargissement de sa politique protectionniste, désormais étendue à la culture. Alors que le cinéma constitue un secteur excédentaire, avec 15,3 milliards de dollars de surplus commercial en 2023, cette annonce inquiète les acteurs d’Hollywood comme leurs partenaires internationaux.
Un cinéma pris pour cible par le protectionnisme
La déclaration de Donald Trump a immédiatement suscité des réactions contrastées. « Notre industrie du cinéma a été volée aux États-Unis d’Amérique par d’autres pays, comme si l’on volait des bonbons à un bébé », a-t-il affirmé, cité par Reuters. Cette formule résume son argumentaire : le cinéma serait victime d’une concurrence déloyale, justifiant une taxe équivalente à 100 %. Pourtant, les chiffres montrent une domination persistante d’Hollywood, qui a exporté pour 22,6 milliards de dollars de films en 2023.
Au-delà du symbole, l’application réelle d’une telle taxe reste juridiquement incertaine. La Maison-Blanche a reconnu dès mai 2025 qu’« aucune décision n’a été prise » sur le mécanisme concret, rapporte Reuters. En outre, la Cour du commerce international a déjà limité le champ des pouvoirs présidentiels en annulant des tarifs jugés excessifs. Comme le souligne The Guardian, l’absence de base légale claire et de calendrier officiel laisse planer un doute sur la faisabilité, et ce flou alimente les critiques d’experts comme Paolo Pescatore, analyste pour PP Foresight interrogé par Reuters, qui estime : « Il y a trop d’incertitude, et cette dernière décision soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses ».
Hollywood inquiet d’un choc culturel et économique
Les réactions dans le monde du cinéma oscillent entre inquiétude et scepticisme. Selon Variety, plusieurs producteurs jugent difficile de prendre au sérieux une annonce dépourvue de détails techniques. Pourtant, l’impact potentiel inquiète. Paolo Pescatore rappelle que « Pour l’instant, dans l’état actuel des choses, les coûts risquent d’augmenter, et cela sera inévitablement répercuté sur les consommateurs ». Pour Hollywood, cette perspective signifie des billets plus chers, des abonnements de streaming renchéris et une redistribution des marges qui fragilisera les studios indépendants. Avec un risque de faire fuir le public.
AP News souligne un autre risque majeur : celui d’une escalade commerciale. Si Washington met en œuvre une taxe de 100 % sur les films étrangers, l’Union européenne ou l’Asie pourraient répliquer en imposant des surtaxes ou des quotas aux films américains. Avec 15,3 milliards de dollars d’excédent commercial en 2023, le cinéma américain serait particulièrement exposé à de telles mesures de rétorsion.
Le cinéma entre stratégie fiscale et bras de fer global
L’annonce de Trump illustre une stratégie plus large de repli économique. Après avoir ciblé l’acier, l’automobile et les biens manufacturés, il s’attaque désormais à la culture, considérée comme un terrain symbolique. Pourtant, ce choix révèle une contradiction majeure : une grande partie du cinéma hollywoodien repose sur des incitations fiscales offertes à l’étranger. Reuters rappelle que le Canada, le Royaume-Uni et l’Australie accueillent une part substantielle des tournages, permettant aux studios américains de réduire leurs coûts tout en conservant leur puissance créative.
Cette interdépendance internationale met en lumière le paradoxe de la taxe envisagée. Comme le rapporte le Los Angeles Times, certains producteurs et responsables politiques plaident pour des crédits d’impôts fédéraux afin de rapatrier davantage de tournages aux États-Unis. Une telle approche, jugée plus réaliste que des barrières douanières, éviterait d’entraîner le cinéma dans une guerre commerciale. Pour l’heure, selon Hollywood Reporter, la plupart des acteurs du secteur attendent des précisions concrètes avant d’adapter leurs stratégies, tout en se préparant à une bataille politique et juridique de grande ampleur.
