Donald Trump impose la renationalisation partielle des entreprises américaines

Donald Trump avance une stratégie économique inédite pour le pays du libéralisme total : utiliser l’État fédéral pour racheter des parts dans des entreprises stratégiques. Avec l’opération Intel en fer de lance, le président bouleverse la doctrine traditionnelle des États-Unis et impose une vision dirigiste qui intrigue, inquiète et redéfinit le capitalisme américain.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 26 août 2025 5h29
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10%L'administration Trump a pris 10% du capital d'Intel.

Le 22 août 2025 marque un tournant. Ce jour-là, Donald Trump officialise l’entrée de l’État américain au capital d’Intel à hauteur de 9,9 %, pour un montant de 8,9 milliards de dollars, financé par des subventions non utilisées du CHIPS Act. L’annonce fait l’effet d’un séisme politique et économique.

Donald Trump, fidèle à son style, promet d’autres opérations du même type. Les observateurs s’interrogent : s’agit-il d’une simple nationalisation partielle pour soutenir l’innovation, ou bien d’un basculement durable de l’économie des USA vers un modèle où l’État détient un rôle central dans les entreprises ?

Donald Trump et le pari de l’intervention directe de l’État

Pour Donald Trump, l’affaire Intel ne doit pas rester une exception. L’acquisition de près de 10 % du capital de la société, obtenue avec une décote de 17,5 % par rapport au cours de clôture, est présentée par le président comme un coup de maître en faveur de l’économie américaine. « Je vais conclure des accords comme celui-là pour notre pays toute la journée », a déclaré Donald Trump selon Reuters. Une décision qui montre sa volonté de lier le destin des entreprises américaines à celui de l’État, quitte à briser le dogme du capitalisme libéral.

L’opération n’est pas isolée. Outre Intel, Donald Trump a déjà utilisé une “golden share” dans U.S. Steel, donnant à l’État un droit de veto sur les décisions stratégiques et opérationnelles de l’entreprise, selon l’Atlantic Council. Il a également pris des parts dans MP Materials, producteur de terres rares. Ces interventions ciblent des secteurs jugés vitaux pour la souveraineté : semi-conducteurs, sidérurgie et minerais stratégiques. Le message est clair : l’économie doit servir la puissance nationale, même si cela implique que l’État devienne actionnaire actif.

Une rupture profonde avec le capitalisme américain traditionnel

La démarche de Donald Trump est sans précédent aux États-Unis. Le gouvernement est devenu l’actionnaire le plus important d’Intel, bien qu’il ne dispose d’aucun siège au conseil et que ses droits de vote soient limités. Malgré ces restrictions, l’impact est immense : jamais l’État n’avait détenu une telle position dans une entreprise technologique privée, et encore moins en achetant des parts via une opération directe.

Cette orientation inquiète la communauté d’affaires. Les milieux patronaux redoutent une politisation des choix industriels et craignent que les décisions futures ne soient dictées par la Maison-Blanche plutôt que par le marché. Bill George, ancien PDG de Medtronic, résume ce bouleversement : « Nous passons d’une économie purement capitaliste à une économie beaucoup plus engagée par l’État », a-t-il déclaré à Reuters. Pour lui, cette mutation remet en question la liberté de gestion et pourrait entraîner des réactions défavorables à l’étranger, notamment dans les négociations commerciales.

Le fonds souverain : nouvelle arme économique de Donald Trump

Au-delà d’Intel, Donald Trump prépare déjà l’étape suivante : la création d’un fonds souverain national. D’après Axios, ce mécanisme doit permettre à l’État américain de multiplier les prises de participation, avec l’accord Intel comme simple acompte. Kevin Hassett, conseiller économique de la Maison-Blanche, a confirmé que d’autres opérations sont à l’étude, afin de renforcer la compétitivité des entreprises stratégiques et d’augmenter leur valorisation boursière.

Pour justifier cette stratégie, Donald Trump invoque la défense de l’emploi et de l’économie nationale. Selon lui, chaque investissement direct de l’État garantit que les entreprises resteront solidement ancrées aux USA. Dans les faits, l’administration mobilise des ressources budgétaires considérables : 8,9 milliards de dollars pour Intel, sans compter les autres participations déjà en cours. La logique est assumée : à la manière de certains États européens ou asiatiques, Washington veut désormais disposer d’un levier de contrôle économique par le biais de parts stratégiques.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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