Route électrique : quand l’autoroute devient borne de recharge pour voiture électrique

Imaginez un réseau d’axes où l’on ne s’arrête plus pour brancher sa voiture électrique mais où elle se recharge tout en roulant. Cette vision n’est plus de la science-fiction : en France, des segments de routes équipés testent déjà la recharge dynamique sur autoroute, posant les jalons d’un futur où les routes qui chargent les voitures pourraient fluidifier l’électrification du parc automobile.

Ade Costume Droit
By Adélaïde Motte Published on 23 octobre 2025 10h50
Route Electrique Quand Lautoroute Devient Borne De Recharge Pour Voiture Electrique
Route électrique : quand l’autoroute devient borne de recharge pour voiture électrique - © Economie Matin

Depuis octobre 2025, un nouveau tournant s'opère dans le monde de la mobilité électrique : les routes qui chargent les voitures sont désormais testées en conditions réelles. Sur un tronçon de l’autoroute A10, près de Paris, l’expérimentation de recharge dynamique par induction permet à un véhicule électrique de gagner jusqu’à deux kilomètres d’autonomie pour chaque kilomètre parcouru. Cette innovation pourrait débloquer une nouvelle étape pour l’électrification du parc automobile, en supprimant l’un des derniers freins : l’arrêt de plusieurs dizaines de minutes à la borne.

Comment fonctionnent les routes qui chargent les voitures ?

Dans la première solution actuellement testée, dite « recharge par induction », une portion de voie est équipée de bobines en cuivre installées à dix centimètres sous l’asphalte. Sur l'autoroute A10, 900 bobines ont été déployées sur un tronçon de 1,5 km à Angervilliers (Essonne). Quand un véhicule électrique équipé d’une plaque réceptrice passe au-dessus, le champ électromagnétique actif le reconnait automatiquement et lui fournit de l’énergie, simultanément à la propulsion. « Un camion gagne environ un kilomètre d’autonomie par kilomètre parcouru, contre deux à trois pour une voiture légère » selon le responsable technique.

Parallèlement, une autre technologie, dite « alimentation par le sol », est testée dans l’Ain via le projet eRoad Mont Blanc, avec un rail conducteur inséré dans la chaussée et un bras articulé sous le véhicule qui capte le courant. Sur une piste de 420 m de long, à Saint‑Maurice‑de‑Rémens, cette technologie est opérationnelle en phase de test. Ces deux procédés illustrent comment les routes qui chargent les voitures peuvent revoir la manière de répartir la recharge : non plus seulement à l’arrêt, mais en mouvement.

Pourquoi ces routes sont-elles un enjeu majeur pour l’électrification ?

L’un des freins majeurs à la démocratisation de la voiture électrique demeure l’enjeu de la recharge : temps d’attente, complexité, besoin de grosses batteries embarquées… Avec une route qui charge les voitures en roulant, plusieurs bénéfices se dégagent.
D’abord, la taille des batteries peut être réduite. En alimentant en continu les véhicules, le besoin d’une autonomie extrême embarquée diminue, ce qui peut faire baisser le coût d’achat.

Ensuite, cela peut fluidifier les trajets longue-distance et le transport lourd. Le projet d’induction sur l’A10 cible aussi les poids lourds, afin de réduire les émissions et d’optimiser la mobilité logistique. Enfin, dans un pays comme la France où l’électricité a, grâce à l'énergie nucléaire, des coûts de production faibles, la perspective est attractive : si la réglementation européenne sur la concurrence entre fournisseurs est adaptée, l’électricité pourrait rester à bas coût pour les usagers, et le pilotage de tels réseaux pourrait optimiser les pics de demande. Ainsi, les routes qui chargent les voitures deviennent un levier pour tirer parti de cette électricité abondante et peu chère.

Où en sont les expérimentations, et quels sont les coûts ?

En ce mois d’octobre 2025, plusieurs projets français sont engagés. Sur l’A10, le projet Charge as you drive est en phase finale : des bobines ont été posées sous la chaussée depuis début janvier et les roulages de prototypes sont prévus imminents.
Par ailleurs, le projet eRoad Mont Blanc prévoit après la phase démonstrateur une extension en conditions réelles sur la RN205 en Haute-Savoie.

En termes de coûts, l’étude «Electric Road Systems, towards decarbonising road transport» indique que le déploiement d’un réseau de 8 800 km pourrait coûter entre 30 et 40 milliards d’euros. Sur l’A10 – selon le reportage – le coût est estimé à 4 millions d’euros par kilomètre. La généralisation des routes qui chargent les voitures demande de lourds investissements. Mais les gains attendus – réduction des batteries, réduction des émissions, simplification de la recharge – pourraient compenser à plus long terme.

Quelles difficultés restent à surmonter ?

Même si la technologie progresse, plusieurs obstacles persistent. D’abord, seuls les véhicules équipés pour capter l’énergie dynamique peuvent en bénéficier. Sur l’A10, il faut une plaque réceptrice fixée sous le véhicule, qui n’est pas encore standard. Ensuite, la question de la standardisation et de l’interopérabilité demeure. Il faut définir les interfaces, les facturations et les infrastructures capables de gérer ces nouveaux modes de recharge.

Puis, le financement et la rentabilité restent incertains. Même si l’électricité française est peu coûteuse à produire, il faudrait sortir des contraintes réglementaires européennes sur la concurrence pour maximiser l’économie d’électricité à bas prix. Enfin, le prix d’achat des voitures électriques reste élevé pour la classe moyenne, ce qui limite l’impact immédiat de ces innovations. Même avec des routes qui chargent les voitures, si l’électrique est trop cher, l’adoption reste freinée.

Ade Costume Droit

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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